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■ ACTU-À Mayotte, les éducateurs de la PJJ se mobilisent
Dans le département français de Mayotte, près d’un quart des effectifs de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) était en grève mardi 31 mai, d’après les syndicats.
Ça devient une habitude, la prime Ségur se trouve au centre des revendications des grévistes. Ce 31 mai, les salariés de la PJJ revendiquaient d’abord son versement qui tardait à venir pour les contractuels. « Sur ce point, la direction nous a fait des annonces très optimistes, explique Alexandre Genolhac, éducateur en milieu ouvert et délégué syndical CGT PJJ. Cela devrait être réglé bientôt. »
Mais un autre point, plus systémique, mobilise le délégué syndical et ses collègues : un problème de recrutement. Près de la moitié du personnel serait recruté en tant que contractuel, sans diplôme d’état. « Des personnes qui n’ont aucune expérience dans le social sont mises directement au travail, sans formation », pointe Alexandre Genolhac.
Sans expérience dans le social
Si le problème existe également en métropole, il devient particulièrement problématique sur le terrain si spécifique de Mayotte, région française de l’océan indien où plus de 40% des habitants seraient sans papier. « Quand la population réelle représente quasiment le double de la population officielle, les services publics se révèlent complètement sous-dimensionnés », explique-t-il.
De plus, l’insécurité y est supérieure et les faits qui ont déclenché le suivi des jeunes par la PJJ, plus graves. « Au moins la moitié de mes suivis relèvent de l’instruction, avec des faits de meurtres ou de viols », explique l’éducateur, un ratio bien supérieur à celui qu’il connaissait en métropole.
Les bidonvilles, où vivent de nombreux enfants suivis, constituent également un terrain particulièrement complexe : « nous n‘avons pas d’adresse, nous pouvons donc mettre deux ou trois semaines à retrouver une famille ou un jeune. » Le suivi des jeunes sans papiers venus de Madagascar et des Comores entraîne lui aussi un accompagnement administratif long et particulier.
Suivis sans adresse
Des spécificités territoriales qui nécessitent un personnel conséquent et compétent, selon le délégué syndical. « Nos écrits ont un impact direct sur la décision du magistrat. Ils peuvent faire qu’un mineur aille en prison ou pas, » rappelle-t-il. D’où l’importance de pouvoir travailler dans de bonnes conditions, avec du temps, des moyens et de la formation.
À ce jour, tous les cadres seraient contractuels. « Sur un terrain aussi difficile, on a besoin d’agents formés, d’un cadre rassurant, de conditions de travail décentes, d’un encadrement qui connait l’institution et notamment les risques psycho-sociaux », résume le syndicaliste. Selon le personnel gréviste, ces conditions font cruellement défaut.
Si le directeur territorial de la PJJ, Hugues Makengo ne souhaite pas s’exprimer sur la mobilisation, il tient à souligner être « à l’écoute de l’ensemble des agents et des organisations professionnelles ». Dans son mail de réponse à Lien Social, il affirme également que « la PJJ poursuit son développement sur le territoire en ayant toujours un regard bienveillant sur les conditions de travail et le bien-être des professionnels ». L’avenir dira si la bienveillance suffira à apaiser le malaise des éducateurs et à professionnaliser l’accompagnement des jeunes.
Louise Jaquet