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■ ACTU - Formation - Éteindre le sens critique
La brève circule sur les réseaux des travailleurs sociaux depuis sa parution dans le Canard enchaîné du 29 janvier. Et elle provoque la stupéfaction. Le Canard révèle qu’un Institut régional de travail social aurait reçu de la Direction générale de la cohésion sociale des « mesures préparatoires à l’organisation de l’épreuve » finale pour les candidats au diplôme d’Etat d’assistant de service social. L’épreuve de quatre heures intitulée « connaissance des politiques sociales et implication dans les dynamiques institutionnelles et partenariales » s’appuie sur des documents. Or, dans sa note à l’IRTS, la DGCS indique : « S’agissant d’une épreuve nationale conduisant à l’obtention d’un diplôme d’Etat, [les documents accompagnant le sujet] ne doivent pas contenir des points de vue critiquant ouvertement une politique portée par le gouvernement ». Indignation dans le secteur.
Contrôle continu
« Les référentiels de formation font apparaître, au-delà de la connaissance de ces politiques publiques, la nécessaire dimension réflexive et d’analyse, le lien avec d’autres dimensions de la formation (analyse de la pratique, capacité à mettre du sens) et la favorisation de l’expression directe des personnes accompagnées (la « participation ») : tous ces aspects engendrent de fait la possibilité d’exercer un regard critique », analyse l’Inter régionale des formatrices et formateurs en travail social (L’IRE). « Affligeante façon d’envisager la critique en démocratie alors que chaque jour, les praticiens mettent en œuvre des politiques publiques et en constatent les améliorations possibles. C’est le sens même de cette épreuve », réagit l’ANAS. « On savait les assistant(e)s de service social « hussards de la République. Les voilà sur le point d’être caporalisé(e)s », lance Didier Dubasque sur son blog. Plusieurs IRTS questionnés font par de leur étonnement sur l’existence d’une telle instruction et affirment ne pas en avoir eu connaissance.
Mauvaise formule
Interpellée par Lien Social, la Direction générale de la Cohésion sociale confirme cependant l’information : « Il s’agit d’une instruction adressée depuis quelques années aux Directions régionales de la jeunesse des sports et de la cohésion sociale (DRJSCS) - et non pas directement aux IRTS - dans la perspective de l’organisation de l’épreuve nationale des diplômes d’Etat d’ASS et d’EJE. Les DR-D-JSCS sont invitées à la communiquer aux centres de formation ». Et d’expliquer que le comité national chargé de sélectionner les sujets a « attiré l’attention de la DGCS quant au caractère polémique » de certains d’entre eux. La DGCS assume donc avoir donné « des précisions pour éviter des sujets ouvertement polémiques concernant la mise en œuvre des politiques publiques ». Elle livre un argument final de taille : « De tels sujets sont en effet susceptibles de mettre en difficulté les étudiants en les obligeant à se positionner sur des questions sans lien avec l’appréciation de leurs compétences ». Avec toutefois un regret : « une formulation maladroite » dans la consigne révélée par le Canard.