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► C’est quoi le problème ? Par Mélodie • C’était mieux avant

Avant, en trois quart d’heure, on avait fait le tour ! Non, non, pas bâclée du tout ! Le temps précis nécessaire à l’échange de points de vue sur une situation complexe. Éduc, assistante sociale, intervenants extérieurs, parents, médecin, psycho et chef de service. Toute la clique réunie et des perspectives de solutions en fin de réunion.
Depuis les visios, tout ça, c’est de l’histoire ancienne !
D’abord, faut trouver la bonne salle, y’a toujours deux trois professionnels qui sont en présentiel (mot qui vient se rajouter depuis deux ans au jargon institutionnel), ensuite, rechercher le matériel que les collègues ont utilisé lors de la dernière réunion, se brancher (pas si simple qu’il n’y paraît, y’a toujours quelqu’un qui sait mieux faire que l’autre), mettre les téléphones au centre de la table pour ceux qui n’ont pas l’image. Quand enfin, les trois clampins, dont je fais partie, réussissent à s’attabler, ont aéré la pièce, ont du gel à proximité, ont déballé leurs notes et ont réajusté leurs masques, le top départ est donné ! Simplement, les trois quarts d’heure habituels sont écoulés, les parents de chez eux s’impatientent, ceux qui sont là consultent leur montre et pensent aux prochains rendez-vous, qu’ils ne pourront pas honorer ; plus personne n’est à ce qu’il fait ! Rappel de l’ordre du jour. Quelqu’un sur l’écran dit qu’il n’a pas compris. Rebelote, il faut ré-expliquer, ôter le masque pour que ce soit plus clair, le remettre pour respecter la loi et ne pas choper le virus. Soudain, l’image d’un écran se bloque, et quand l’image reprend vie, un visage grimaçant bégaye sur la fin d’un mot ; les « oh, oh, oh » se répliquent sur la petite assemblée en éclats de rire général. La porte s’ouvre, l’orthophoniste déboule en plein milieu de la réunion parce qu’en fait, de son bureau, qui est juste au premier, elle ne comprend rien au brouhaha. Elle préfère être en visio, même en étant dans les murs ! Les rires se transforment en sidération, laquelle ne passe pas inaperçue à ceux qui nous scrutent à travers les écrans. Impossible de tomber des nues, sans être transparents auprès d’eux. Montrer nos désaccords ce n’est pas joli, joli, mais mince « faut pas exagérer non plus », si elle est là, c’est aberrant qu’elle n’y soit pas en chair, en os et masquée comme tout le monde !
Au bout de deux heures, plus personne n’est cohérent, ceux qui n’ont pas l’image sont complétement perdus. L’enfant n’est plus au centre, l’énervement prend le dessus, ceux qui sont chez eux assistent à un drôle de chaos. Sur un écran, on aperçoit des enfants qui réclament un jus de fruit à leur mère, laquelle les envoie balader car, quand même, elle est en réunion pour leur frère et « chut » ne faîtes pas de bruit, c’est important. Les gosses regardent ce qui est plus essentiel que leur soif et restent bouche bée. L’orthophoniste pleure et repart en claquant la porte, le chef de service demande à chacun de -s’asseoir-on-en-a-pas-terminé, le médecin demande ce qui se passe via l’écran ; personne ne le calcule, l’éduc remballe son dossier et sort fumer.
Il n’est pas beau le progrès, vu sous cet angle ?