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■ ACTU - Centres de rétention administrative : la France hors-la-loi
Le 17 mars, cinq associations présentaient leurs constats sur la situation dans les centres de rétention administrative (CRA) de France en 2021. Enfermement d’enfants, rétention illégale, conditions de vie indignes… Des conclusions toujours plus préoccupantes.
« Les préfectures privilégient l’enfermement en CRA avec un manque de discernement parfois frappant s’agissant de personnes malades ou fragiles, ou pouvant présenter des garanties de représentation », constate Jean François Ploquin, directeur de l’association Forum réfugiés-Cosi. Ainsi, en 2021, plus de 42 000 personnes ont été maintenues en rétention en métropole et Outre-mer. La France, pourtant déjà condamnée à huit reprises par la Cour Européenne des droits de l’homme (CEDH) pour l’enfermement des enfants, persiste dans cette pratique. Dans ses vingt-cinq, au moins 3135 enfants ont été retenus plusieurs jours à Mayotte et 76 en métropole. La moyenne d’âge des enfants enfermés est de 6 ans et demi.
Logique d’enfermement systématique
La durée de rétention ne cesse d’augmenter alors même que le nombre d’éloignements effectifs reste stable. « Cela signifie en pratique la multiplication des tensions, des actes d’automutilation, des tentatives de suicide. On comptabilise trois décès en 2021 », déplore Mathilde Buffière, responsable du service rétention du groupe SOS. Le gouvernement ne veut pas s’arrêter là. D’ici 2024, au moins 434 places supplémentaires s’ajouteront aux 2000 actuelles. En plus de la construction de nouveaux CRA, l’administration cherche à multiplier de manière abusive le nombre de locaux de rétention administrative (LRA), lieux d’enfermement « low cost » improvisés par simple arrêté préfectoral et pourtant limités par la loi. « L’assistance juridique en LRA n’est pas obligatoire, il y a donc peu de transparence et notamment sur le nombre de personnes qui y sont enfermées », relate Justine Girad, responsable des questions rétention à la Cimade. Aujourd’hui vingt-deux LRA seraient en activité pour 128 places.
Les associations dénoncent une logique d’enfermement systématique du gouvernement qui s’est obstiné malgré la pandémie mondiale. Les sortants de prison ont été volontairement maintenus en rétention. Les gestes barrières n’ont pas pu être respectés. Aucune vaccination n’a été proposée, des retenus ont été hospitalisés en réanimation. Plusieurs personnes ayant refusé le test PCR ont même été condamnées à de la prison ferme. L’Administration est allée jusqu’à contourner la loi à plusieurs reprises en maintenant en rétention des personnes, et ce malgré des décisions de la CEDH jugeant l’enfermement incompatible avec de graves pathologies ou des risques de traitement inhumain et dégradant. « Comment en est-on arrivé là ? », s’interroge Dominique Simonnot contrôleuse générale des lieux de privation de liberté (GGLPL). Pessimiste, elle rappelle que des juges ont permis l’éloignement de familles Ukrainiennes et Afghanes ces derniers mois.
Jérémie Rochas
Photographies : Centre de rétention administrative de Lesquin (Nord) : ©Jérémie Rochas