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• TERRAIN - La mobilisation paie

Par Jean-Luc Boero, Président de la section LDH de St-Nazaire


Lien Social avait rendu compte sur son site de la mobilisation du 20 mai des professionnels de l’ASE de Loire Atlantique (https://www.lien-social.com/o-Terrain-Loire-Atlantique-les-raisons-de-la-colere). Ce mouvement social semble avoir porté ses fruits, puisqu’un plan de 7 millions d’euros est prévu pour renforcer la protection de l’enfance dans ce département. La Ligue des droits de l’homme a réagi à cette orientation proposée par le nouvel exécutif élu en juin dernier. Le Président de l’une de ses sections départementales fait le point.
Notre association, en tant que membre du CEP- Enfance (construire ensemble la politique de l’enfance) qui vient de publier l’ouvrage collectif « Etat d’urgence, nos exigences pour 2022 et après », est particulièrement intéressée pour faire avancer la cause des enfants et maintenir la place centrale de la protection de l’enfance dans les politiques des Conseils départementaux. Nous avons appris, dans l’édition des 16-17 octobre du journal Ouest-France, qu’un plan de 7 millions sera présenté au vote des élus départementaux le 18 octobre. Nous voyons ce plan comme la suite du mouvement des personnels de l’ASE. Nous y voyons aussi la reconnaissance tardive des manques de moyens par l’administration et les élus en place. Certes, un Conseil départemental seul ne peut se substituer aux carences de l’Etat et ne peut aussi à lui-seul répondre aux énormes défis de la jeunesse d’aujourd’hui et de demain. Pour autant, que de temps perdu dans un secteur qui est sinistré depuis des années. Nous savons que le Conseil départemental de Loire Atlantique a dû affronter l’arrivée massive des Mineurs non accompagnés et cela l’a certainement conduit à se centrer prioritairement sur cet accueil de plus de 800 jeunes. Mais les signaux d’alerte étaient présents :
- raréfaction des Familles d’accueil, malgré quelques avancées en termes d’intégration et de rémunération,
- engorgement des dispositifs de milieu ouvert : actuellement, il faut compter en moyenne 6 mois pour démarrer une AEMO,
- manque cruel de places pour les bébés depuis des années,
- manque de dispositifs pour les jeunes relevant aussi du médico-social, malgré quelques avancées,
- manque crucial de places d’accueil qui a conduit à cette dérive d’un usage immodéré de gîtes où plus de 200 enfants y vivent en permanence. Avec pour effet des prix de journée qui ne cessent d’augmenter et des coûts induits en forte hausse dont les frais de transport pour les jeunes,
- épuisement massif des professionnels, cadres et agents de terrain inclus, et en la matière, la collectivité n’a fait que de quelques maigres avancées,
- tension interne due à une réorganisation qui alourdit le dispositif et produit une inertie et des procédures souvent décalées de la réalité enfermant les professionnels dans des contraintes de plus en plus fortes, génératrices d’un manque de créativité et d’agilité. Le plan de 7 millions présente un périmètre porteur d’avenir et nous savons aussi que la méthode pour le nouveau schéma départemental sera beaucoup plus participative. Ce sont autant de gages de bonne volonté pour envisager une amélioration nécessaire de la protection de l’enfance. Mais nous savons aussi qu’il faudra bien plus que ce plan, qu’il faut apporter des réponses plus fortes, plus rapides, plus essentielles et plus symboliques. Il faudra s’atteler très rapidement à un grand plan pour le milieu ouvert et pour résorber la situation des enfants en gîte. Revoir l’organisation des directions enfance-famille s’avère aussi crucial car la volonté politique peut être enrayée par une administration trop empesée. Il est temps que l’expertise des professionnels de terrain et des usagers soit au cœur du nouveau dispositif. Nous ne pouvons qu’encourager notre Conseil départemental à être toujours aussi proche des associations de protection de l’enfance, sans faire du cousinage d’intérêt et de s’approcher du milieu associatif comme vous cela a été fait avec les jeunes majeurs. Le président de cette collectivité aura aussi à se pencher sur la grave crise de recrutement du secteur. Car rien ne pourra se faire sans des professionnels reconnus, formés et rémunérés à la hauteur de leur mission délicate. Ainsi, nous saluons la prise de conscience du nouvel exécutif face aux dramatiques manques qui existent à l’ASE et nous serons à ses côtés si l’effort reste durable et devient encore plus net.