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■ ACTU - Loi "séparatisme" • L’alerte des associations
Frédérique Pfrunder, déléguée générale du Mouvement associatif, revient sur les inquiétudes du Mouvement face à la loi « confortant le respect des principes de la République ». Adoptée par la commission spéciale le 23 janvier, elle devrait être débattue en séance publique à partir du 1er février. Cette loi inquiète le monde associatif, notamment parce qu’elle prévoit la signature d’un contrat d’engagement républicain pour recevoir des subventions. Pour le Mouvement associatif, il s’agit d’une atteinte aux libertés associatives, une analyse qu’il développe dans une tribune publiée sur francetvinfo le 18 janvier.
Dans votre tribune, vous pointez notamment l’obligation faite aux associations de signer un contrat d’engagement républicain, pouvez-vous nous dire en quoi il vous inquiète ?
Le principe de ce contrat nous heurte. Nous affirmons que les associations sont des partenaires de l’action publique et non des opérateurs, la relation doit se construire dans le dialogue et la confiance. C’était bien le principe de la charte des engagements réciproques signée entre l’Etat, le Mouvement associatif et les représentants des collectivités. Cette charte rappelle les principes républicains auxquels la très grande majorité des associations adhérent et qu’elles portent elles-mêmes très fortement dans leurs activités. Ce contrat nous est imposé comme si nous étions de simples opérateurs de politiques publiques. C’est ne pas reconnaître que les associations elles-mêmes travaillent les principes de la République en permanence, ils ne peuvent être imposés par l’Etat, ils sont construits par les citoyens et par les organisations qui les rassemblent, dont les associations en premier chef. C’est tout l’esprit de la loi de 1901.
Est-ce qu’il y a eu une concertation autour de ce point du texte de loi ?
Nous avons eu une réunion mi-décembre avec Marlène Schiappa d’à peine une heure où les articles du texte de loi nous ont été présentés. On nous a dit qu’une concertation serait ouverte mais nous n’avons plus eu de nouvelles jusqu’à la sortie de notre tribune. Le cabinet de Marlène Schiappa nous alors appelé pour nous assurer qu’il y aurait concertation. Mais le texte est déjà en discussion.
Comment interprétez-vous l’objectif de ce contrat ?
Nous ne comprenons pas bien l’objet de ce contrat, il y a évidemment des associations qui sortent des clous mais il existe déjà un cadre légal, des outils de contrôle sur les associations et les subventions qui leur sont versées. D’ailleurs, il n’y a aucune obligation à donner une subvention si l’administration ou la collectivité à un doute sur les modalités de fonctionnement d’une association.
Quelles conséquences aura ce texte sur le monde associatif ?
Ce contrat ne concerne pas que l’action subventionnée mais toute l’action de l’association or si vous prenez une association de défense de l’environnement, elle peut avoir des actions de sensibilisation à l’environnement qui sont subventionnées et des actions d’interpellation de la puissance publique. Cette dernière pourrait alors considérer que cela vient déranger l’ordre public et arrêter les subventions sur ce motif, donc on vient là réduire ce qui fait l’intérêt d’une association c’est à dire d’être en capacité d’interpeller, d’incarner, de discuter une politique publique. Il faut se rappeler que les associations innovent, font avancer des sujets extrêmement important qui ensuite sont acceptés par toute la société. On se dit alors : heureusement qu’elles étaient là. Rappelons-nous des actions d’Act-up au début de l’épidémie de Sida. Elles ont pu être considérées comme non-républicaines or elles ont fait avancer le droit des patients de façon considérable. Plus récemment, prenons l’exemple du délit de solidarité. Des associations se sont retrouvées devant la justice, l’Etat considérait qu’elles ne respectaient pas le cadre légal en aidant des personnes exilées. Or, le conseil constitutionnel a considéré que par leurs actions elles faisaient vivre le principe de Fraternité de notre devise républicaine. Les associations forgent les principes républicains, or, ce texte acte d’une non-reconnaissance de l’apport des associations à la vie démocratique et à la construction de la République.