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■ ACTU - Rapport cours des comptes : une décentralisation inachevée qui "nuit à l’efficacité des politiques sociales"
Après 40 ans de décentralisation, les politiques sociales sont encore régies par différents nivaux de décisions. Elles pâtissent de cette « complexité institutionnelle », d’un pilotage et d’une coordination insuffisants, avec des conséquences sur l’accès aux droits.
Le rapport 2023 de la Cour des comptes dresse un bilan sans concession d’une stratégie de décentralisation « inaboutie », dont les objectifs en terme de services rendus aux usagers ne sont « pas atteints », selon son premier Président, Pierre Moscovici.
Après 40 ans, une décentralisation mal aboutie freine l’accès aux allocations individuelles de solidarité et génère des inégalités territoriales.©Dominique Eckenfels/Flickr
Si, « chefs de file de l’action sociale », les départements disposent de compétences décentralisées en matière de protection de l’enfance, de lutte contre la pauvreté, de handicap, d’autonomie des personnes âgées, l’État conserve un rôle central dans les politiques de solidarité, qui au nom de l’égalité, doivent rester nationales.
D’autres acteurs interviennent également : les communes à travers les centres communaux d’action sociale (CCAS), les caisse d’allocations familiales.
Revoir le mécanisme de financement des allocations individuelles
Dans ce « millefeuille institutionnel », les outils actuels de pilotage ne permettent « pas d’assurer la bonne coordination des interventions publiques », estime le rapport. Cette situation « nuit à l’efficacité des politiques sociales et à la qualité du service rendu » et se traduit par des difficultés d’accès aux droits, des délais de réponse excessifs et des ruptures de parcours.
La Cour préconise d’améliorer les outils de pilotage et de programmation à la main des départements, à travers « quatre schémas départementaux » qui soient « plus prescriptifs » dans leurs domaines de compétences. Elle propose aussi de réformer le financement des allocations individuelles de solidarités (AIS), que sont le revenu de solidarité active (RSA), l’allocation adulte handicapé (AAH) et la prestation de compensation handicap (PCH).
Compenser la dépense réelle
L’État prendrait en charge une « dotation de solidarité » qui représenterait 60 à 70% de la dépense réelle d’AIS. Il verserait au département un « complément » de 10 à 20% de la dépense, sous réserve de « contractualisation » sur la base d’objectifs de performance. Le solde restant (10 à 30% de la dépense) serait financé par les ressources propres du département. La Première ministre n’est pas favorable à cette proposition.
De son côté, l’association des départements de France revendique « un véritable transfert de compétences, de responsabilités, de pouvoir normatif », et « une compensation intégrale des AIS, non assortie d’objectifs ». Alors que les dépenses sociales des départements, dont la moitié est consacrée au financement des AIS, ont atteint 41,7 milliards d’euros en 2020, les départements regrettent d’être « insuffisamment entendus en amont des grandes décisions qui les impliquent directement ». À 40 ans, la décentralisation peine encore à avancer sur ses deux jambes : la politique sociale et son financement.
Mariette Kammerer
À lire aussi dans Lien Social n°305 : Action sociale et décentralisation et dans le n°1334 : Accès aux droits • Sur la piste du non-recours