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► LE BILLET de Ludwig • J’ai retrouvé la 7e compagnie

Été. Chaleur caniculaire. L’ambiance de ce pont du 14 juillet sur ce bras de rivière est quelque peu à la fête. Le monde est venu de partout. Il y a les vacanciers bien sûr, mais surtout la population locale, connaisseuse privilégiée de ce coin enchanté.
Il y a la jeunesse bien entendu. Celle des quartiers locaux. Qui vient échapper pour quelques heures à la suffocation de leur béton. Ils sont arrivés en scooter, installés, là, sur les rochers. Les fauteuils de camping ont les pieds dans l’eau, la chicha est de sortie, et l’enceinte crache leur musique autotunée. Quelques odeurs de pétards ici et là parcourent l’air en totale liberté. Ils sautent et plongent des rochers, de leur rocher d’ailleurs, tant ils ont pris la place. Tant c’est leur territoire. C’est un peu étrange, pour autant, d’observer cette mixité à laquelle nous n’avons plus l’habitude. De ma serviette, quelque peu ensuqué de ma sieste sous 35 °C, j’observe tout ce beau monde en rêvant d’un monde métissé et mélangé. Tous en maillot, de n’importe quelle couleur de peau, on rigole et on se branche de nos pirouettes, de nos figures improvisées qui finissent en gros plouf.
Mais voilà qu’apparait au loin, dans une vision un peu surréaliste, je l’avoue, un paquet de treillis militaires. Qu’est-ce que c’est que ce délire qui vient troubler mon décor de carte postale ? Quel face-à-face va avoir lieu dans quelques minutes ? Nous sommes un mois après les épisodes de violences urbaines qui ont vu s’affronter les forces de l’ordre et les jeunes. Les voilà qui avancent au pas, en tenue, rangers aux pieds et sacs chargés sur le dos…seule la rivière sépare ces deux mondes qui se font face maintenant. Les jeunes plongent toujours, ils les ont vus, mais ne semblent pas perturbés. Ils sont chez eux, là, sur leurs rochers. À leur tour, tout habillé, les bidasses en folie se jettent à l’eau. Exercices. Ils traversent le bras d’eau. Ils sont accueillis par les applaudissements et autres bravos de la jeunesse ! Voilà maintenant que la 7e compagnie se met à sauter de plusieurs mètres, encouragé par ces mêmes jeunes. C’est un peu fou. C’est un peu chouette aussi. C’est la trêve estivale. Et puis, la rivière est à tout le monde, la terre est à tout le monde. Les différences s’évaporent sous la chaleur, les canoés passent parmi tout ce beau monde bigarré aux shorts fluo, aux quelques burkinis et aux enfants sur leurs licornes gonflables.
Je viens quand même d’assister à une scène incroyable. J’apprendrais par la suite que ce n’est pas la première fois que ces deux mondes se croisent. Que les militaires sont des élèves infirmiers. Qu’importe d’ailleurs.
Allez, je vais me tenter un petit saut de l’ange !



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