N° 1203 | Le 16 mars 2017 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)
L’engagement sectaire n’est pas un chemin linéaire, ni une route rectiligne et uniforme. Il y a des embranchements, des dérivations, des avancées et des reculs possibles, des moments de fragilité et des capacités de résilience. C’est ce long processus, qui prétend combler les failles identitaires par un idéal total et une prothèse de croyance ne souffrant aucun doute, que nous propose d’explorer ce livre.
En amont du radicalisme, on trouve la quête de sens face à la relégation spatiale, la précarité économique et le vécu de discriminations et d’injustices. En aval, il y a la désaffiliation et le déclassement. Face à une société échouant à offrir un rêve collectif autre que la marchandisation articulée à une crise d’autorité et de légitimité, les recruteurs islamistes savent exploiter les fragilités psychologiques qui en résultent. Ils proposent un contre système opposant la frugalité à l’opulence, la pudeur à la sexualité agressive, la spiritualité au matérialisme. Surfant sur une quête de reconnaissance, ils utilisent des messages simples clivant le monde en vrai/faux, pur/impur, bien/mal, eux/nous. Ils s’appuient sur l’attirance pour le risque identifié comme manière d’affirmer sa valeur et séduisent par la promesse d’appartenance à un groupe exceptionnel parce qu’élu.
Deux populations particulières apparaissent sensibles à cet embrigadement. Les jeunes exclus, d’abord, ceux qui vivent un profond ressentiment nourri par la relégation spatiale, la précarité économique et le vécu de discriminations et qui ont intériorisé la haine de la société. Les enfants des classes moyennes, ensuite, qui cherchent une reconnaissance identitaire à travers la mise à l’épreuve et les rites de passage.
Dans le même numéro
Critiques de livres
Sous la direction de Pierre-Joseph Laurent