Asile : retrouver le sens de la mission d’accueil
Présent en région parisienne depuis 1989, le Centre d’entraide pour les demandeurs d’asile et réfugiés (Cèdre) du Secours Catholique a décidé de fermer son accueil à partir de mardi 24 octobre. La réouverture est théoriquement prévue le lundi 13 novembre. La directrice adjointe, Alice Bougenot explique par mail cette décision auprès de ces partenaires. « Cette période de fermeture permettra à tous les acteurs du Cèdre (bénévoles, salarié·es, exilé·es) de réfléchir et construire des nouvelles formes d’accueil tenant compte du durcissement organisé de l’État qui gère des « flux » et des « stocks » et non des personnes dont il nie la souffrance qu’il génère, mais aussi en tenant compte des missions de l’association ».
Pallier les défaillances de l’État
Le contexte ne permet plus à ce lieu d’accueil de préserver ses valeurs : accueil inconditionnel, écoute individuelle, respect de la dignité et des droits, information et orientation. De plus en plus, l’espace doit pallier les défaillances multiples de l’État. « Entre le 1er septembre et le 17 octobre, soit 19 jours d’ouverture, 639 nouvelles personnes ont été accueillies et reçues en entretien individuel. Sur la même période en 2016, nous avions accueilli 426 personnes, et 284 personnes en 2015. Malgré toute leur bonne volonté et leurs multiples compétences, les bénévoles et salariés du Cèdre ne sont plus en mesure d’accueillir dignement », poursuit-elle.
Cette situation découle de dysfonctionnements dès le premier maillon de la chaine d’accompagnement des exilés sur le territoire français. Les associations gestionnaires de plateforme d’accueil des demandeurs d’asile (PADA) les orientent régulièrement vers les structures associatives citoyennes pour un accompagnement qui relève pourtant de leur responsabilité : aide au récit OFPRA, accès à une couverture maladie, hébergement… Actuellement, même les personnes les plus vulnérables sont amenées à dormir dehors faute de proposition d’hébergement. Et si l’hébergement citoyen s’organise, il ne peut pas répondre à l’ensemble de la demande.
Même les plus vulnérables dorment dehors
De son côté l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) ne verse pas correctement l’allocation pour demandeurs d’asile, laissant les personnes sans aucun moyen de subsistance. Là encore, la société civile s’efforce de compenser en proposant des repas. Parallèlement, l’État réaffirme sa volonté de mettre en œuvre des procédures de non accueil : Dublin, assignation à résidence, expulsion… Amenés à gérer l’urgence, les collectifs et associations de soutien aux exilés commencent à s’interroger sur la pertinence de leurs actions. Car le risque est de masquer sans infléchir la politique menée par le gouvernement. « Cette fermeture n’est donc pas un temps de pause, mais bien un temps de travail entre tous les membres du Cèdre, personnes exilées comprises, pour retrouver le sens de notre mission. »