N° 1278 | Le 1er septembre 2020 | Critiques de livres (accès libre)
Penser l’école
Quand un media en ligne comme « AOC » rassemble certains de ses articles sur le thème de l’école, cela produit un concentré d’intelligence. Des textes courts, limpides et percutants donnent l’occasion d’une réflexion décapante et critique sur une institution pour laquelle tout le monde a quelque chose à dire, mais peu à penser. Voilà de quoi nous rattraper. Au gré des pages, on s’interrogera sur la mixité tant genrée que sociale qui combat l’intolérance et la ségrégation. Mais, s’enrichir au contact des autres est un bienfait jusqu’à ce qu’on soit assigné à une identité obligatoire dont la conformité est imposée par son groupe de pairs. On réfléchira différemment à la réforme de l’entrée en université qui, sous couvert de combattre les 60% d’échecs en première année, réduit les possibilités d’erreur, d’hésitation et d’essai dans la construction du parcours d’un étudiant dans ses choix d’orientation et de bifurcation. On rejettera la rumeur de l’échec scolaire des enfants d’immigrés dont le parcours est bien plus hétérogène et diversifié qu’on ne le croit, leurs difficultés tenant bien plus à leur statut de fils d’ouvrier que d’étrangers. On découvrira une éthique enseignante fondée non sur l’excellence, mais sur les valeurs de la justice, de la bienveillance et du tact … tant mises à mal par le culte de la performance et de la concurrence. On comprendra la dénonciation du mythe méritocratique qui fait peser sur les élèves la responsabilité de leurs échecs. Autant d’analyses qui, pour la plupart, nous rappellent combien l’école est là pour sélectionner et coopter les élites dirigeantes. Malgré la massification scolaire, les vainqueurs et les vaincus d’hier sont toujours les mêmes. Sauf qu’ils sont victimes non d’un tri individuel préalable, mais d’une compétition continue.
Jacques Trémintin
Dans le même numéro
Critiques de livres