N° 617 | Le 11 avril 2002 | Patrick Méheust | Critiques de livres (accès libre)
De 700 000 dans les années 70, la population étudiante est composée aujourd’hui de plus de 2 000 000 d’individus. On mesure à travers ces seuls chiffres l’ampleur du phénomène et l’on peut, d’ores et déjà, se faire une idée assez précise du poids considérable des établissements d’enseignement supérieur.
Outre sa fonction traditionnelle de transmission du savoir académique et de recherche dans les disciplines fondamentales l’université est devenue également, n’en déplaise aux partisans d’un certain isolationnisme universitaire, un acteur fondamental du développement local. Cette dimension n’échappe pas aux élus des collectivités locales qui, pour la plupart, se déclarent preneurs d’une implantation universitaire sur leur commune. Cet « essaimage » est d’ailleurs facilité par la multiplication des filières d’enseignement plus ou moins professionnalisé confiées à ces structures de proximité que sont les IUT.
Cependant, l’intégration de l’université dans le paysage urbain n’est pas toujours implicite. L’emprise foncière des bâtiments, souvent de grande ampleur, peut générer des conflits assez « primaires » d’occupation du territoire. La faculté grignote, en effet, la surface disponible pour d’autres équipements d’une utilité plus immédiate (parkings, etc.).
D’autre part, dans certains quartiers quelque peu défavorisés, la présence universitaire peut être interprétée comme une forme d’arrogance ou de provocation à l’égard de populations gravement affectées par les problèmes du chômage, de l’échec scolaire, déstabilisées par un mal-être social d’une manière générale. Mais, d’un autre côté, indiscutablement, une implantation universitaire peut aussi contribuer à redorer l’image d’une agglomération relativement déconsidérée du fait de ses attributs socio-économiques et impulser des développements notables en matière d’activités commerciales et autres. Le monde universitaire est effectivement censé incarner un certain dynamisme dans de multiples aspects.
Aussi faut-il s’attacher à penser l’université de manière décloisonnée, c’est-à-dire en relation étroite avec l’environnement de son site d’accueil. La fac doit devenir ainsi un véritable lieu public dont les services resteront largement ouverts vers l’extérieur (cafétéria, bibliothèque, équipements sportifs, formation continue ?). Des événements forts, tels que colloques ou festivals, pourront également aider à resserrer les liens entre les différentes communautés. Ces échanges ne demeureront pas longtemps à sens unique car, à l’inverse, l’artificialité des campus pousse les étudiants à fréquenter les quartiers périphériques, là où selon eux se situe la « vraie » vie. En somme, l’équilibre recherché a toutes les chances de se réaliser sous la forme d’un subtil échange de bons procédés.
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