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🎥 CINÉ ‱ ComplexitĂ© de la violence




Une famille se dĂ©lite ; la fille aĂźnĂ©e entretient une relation complexe, complice et violente avec son pĂšre. Au-delĂ  de la rage, des cris, des coups parfois, perce l’amour. Troublant.





SymptĂŽme du malaise et du conflit familial, le chat pisse partout dans l’appartement. Les parents sont fraĂźchement sĂ©parĂ©s de maniĂšre houleuse, le logement est en travaux, les deux filles du couple cherchent Ă  surnager. Éva, adolescente de seize ans, jouant habilement de la situation, parle de vivre avec son pĂšre.





Paternité immature

Ce pĂšre est poĂšte, fragile, mal dĂ©fini socialement, et se laisse facilement dĂ©border par sa propre violence. DĂ©faillant, et plein de tendresse maladroite dans son t-shirt siglĂ© Iron Maiden. AngoissĂ©, aussi : cette tĂąche sur la langue, un aphte, ou un cancer ? Avec sa fille, dans les moments de grĂące, ils aiment dĂ©chiffrer les graffitis d’amour sur les murs. Impulsive, Éva lui ressemble et sa mĂšre, Anca, ex-danseuse, n’en peut plus : « elle est invivable, comme possĂ©dĂ©e par le mĂȘme dĂ©mon ».





Violence partout

« Tu veux la guerre ? » La violence est dans les relations — dĂšs que le pĂšre a un comportement violent, la petite sƓur fait pipi sur elle —, sur la route (mĂȘme si Éva est Ă  la place du mort), dans les homĂ©lies des Ă©vangĂ©listes, dans un tatouage 666 sur les seins ou des dents volontairement noircies. Dans les fĂȘtes, oĂč coke et autres substances destructrices sont lĂ , et oĂč l’adolescente entend tout essayer. Chez la mĂšre aussi, qui rappelle Ă  sa fille aĂźnĂ©e leur pacte de non-violence Ă  la maison, mais qui craque en Ă©voquant d’y mettre le feu. Et dans la dĂ©floration de la jeune fille, mĂȘme si les sentiments sont mitigĂ©s.





Poésie

Venant du Costa-Rica, la cinĂ©aste s’étonne du « respect funĂšbre » que les EuropĂ©ens rĂ©servent Ă  la poĂ©sie, alors qu’elle la dĂ©crit comme « caractĂ©ristique de l’identitĂ© costaricienne ». Elle la met dans son film : « j’ai des rĂȘves Ă©lectriques / OĂč mon pĂšre, quand il ne peut pas rĂ©parer quelque chose / L’écrase par terre / La rage qui nous traverse ne nous appartient pas
 ». Le chat lui-mĂȘme, personnage non nĂ©gligeable, porte le nom d’un poĂšte jamaĂŻcain. Et les ateliers poĂ©sie, peut-ĂȘtre, Ă©vitent le pire.





Le bien, le mal, et


À partir d’un sujet universel — la violence —, la rĂ©alisatrice explore le cĂŽtĂ© sombre de certaines relations affectives, l’adrĂ©naline de la violence et ses effets, le dĂ©sir sexuel « mystĂ©rieux et instable » et mĂȘme la diffĂ©rence, pas toujours parfaitement claire selon elle, entre situation de consentement et d’abus. Terrain ultra-sensible, finement traitĂ©, sans victimisation aucune, sans complaisance. « Il y a dans le dĂ©sir des parts d’ombre qui nous dĂ©passent » observe la cinĂ©aste. L’exploration est rĂ©ussie.

Joël Plantet





Tengo sueños electricos [j’ai des rĂȘves Ă©lectriques]


Un film de Valentina Maurel. 103 mn.
Avec Daniela Marin Navarro (Eva), Reinaldo Amien Gutiérrez (Martin), Vivian Rodriguez Barquero (Anca), Adriana Castro Garcia (Sol).

Sortie 8 mars.



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