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🎥 CINÉ ‱ Urgences en Seine-Saint-Denis

Bienvenue Ă  l’HĂŽpital Delafontaine Ă  Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). Amin, Evan, HĂ©lĂšne, Lucie et MĂ©lissa, Ă©tudiants en mĂ©decine, travaillent aux urgences. Éric GuĂ©ret les a suivis pendant six mois. Sur le plan mĂ©dical, on voit comment une Ă©quipe procĂšde Ă  des gestes professionnels comme l’intubation, la suture, le scanner, la rĂ©animation, les opĂ©rations au bloc, etc. Mais surtout, dans une belle architecture moderne, entre couloirs colorĂ©s, salle de rĂ©union, boxes de consultation, chambres, cafĂ©tĂ©ria, cantine, rĂ©serves de matĂ©riel, bureau syndical, les situations professionnelles et les entretiens avec les malades sont trĂšs bien filmĂ©s, avec douceur, beaucoup de respect et de trĂšs bonnes analyses, jamais dans le stress.
Le chef du service accueille ces jeunes qui dĂ©couvrent, souvent avec humour, les consultations en anglais approximatif, les Ă©tats somatiques (liĂ©s Ă  l’alcool ou Ă  la toxicomanie, Ă  la violence faite aux femmes, aux balles perdues dans les citĂ©s). Ils se confrontent avec beaucoup d’aisance apparente et de doutes silencieux aux crises psychiatriques, aux fractures, aux cas de plaies Ă  refermer, aux problĂšmes respiratoires liĂ©s au Covid ou non, aux crises d’asthme, Ă  l’épilepsie, aux infections et Ă  l’isolement de certaines personnes ĂągĂ©es...



Sous-effectif et manque de lits

Ils sont trĂšs vite mis Ă  pied d’égalitĂ© avec les internes, les seniors. Quelques bons coups de gueule efficaces permettent de communiquer sur les retards et sur la fin des soins avant l’arrivĂ©e des Ă©quipes de nuit (souvent en sous-effectif), sur la bonne gestion des manques de lits (quitte Ă  y passer deux heures). On aborde les problĂšmes de matĂ©riel (cĂąbles manquant, imprimantes en panne, toilettes bouchĂ©es, pĂ©nurie de chambres, temps Ă  passer pour orienter un patient vers un autre hĂŽpital pour un suivi, manque de personnel de nuit comme de jour). On voit comment l’équipe travaille pour transfĂ©rer des patients ou pour rĂ©organiser tout l’espace, si un cas de Covid est prĂ©sent et demande donc l’isolement et la dĂ©sinfection supplĂ©mentaire de tout le service. La question de la responsabilitĂ© ou de la faute professionnelle est Ă©vitĂ©e, collectivement. Si une situation est dure, on ne reste pas seul avec : on appelle Ă©ventuellement le service sĂ©curitĂ© en renfort.
La violence des cas psychiatriques est toujours abordĂ©e d’abord par un entretien rondement menĂ©, suivant tout un bon protocole (avant l’attache et la sĂ©dation de la personne si elles s’avĂšrent nĂ©cessaires. On laisse ces patients partir, s’ils le souhaitent, sans jouer aux super hĂ©ros car il vaut mieux gĂ©rer le tout-venant et bien soigner / bien orienter. Les choix professionnels sont clairs. Les sĂ©jours y sont longs. Or les manques de lits sont dĂ©noncĂ©s, ici. Il faudrait un tiers de lits en plus, mĂȘme si la santĂ© ne sera jamais rentable.



Engagement

La rĂ©flexion de ces jeunes sur leur mĂ©tier et sur l’importance de la fonction publique souligne bien l’engagement humanitaire quotidien dans lequel ils s’inscrivent totalement, malgrĂ© leur fiche de paye scandaleuse. Leur passion et leur dĂ©vouement sont totaux (mĂȘme si l’universitĂ© ne les a pas prĂ©parĂ©s Ă  des situations concrĂštes). Ils revendiquent leur rĂŽle, mĂȘme si l’arrivĂ©e aux urgences restera un passage dans leur vie, cette Ă©tape les confrontant Ă  toutes les situations et Ă  tous les types de diagnostics. La vision technologique de l’hĂŽpital est ici secondaire car la relation et le travail humain priment, passant avant les ordonnances, les rĂ©unions teams et l’administration. Ces nouveaux soulignent trĂšs bien comment ils cherchent Ă  crĂ©er des « outils d’orientation pour les patients » qui restent Ă  inventer comme, par exemple, des adresses pour aider Ă  porter plainte, des listes d’associations spĂ©cialisĂ©es (pour des problĂ©matiques ou maladies spĂ©cifiques), des aides aux personnes rĂ©fugiĂ©es, des guides juridiques, des contacts avec la Maison des femmes de Saint-Denis (1) ou des associations de quartier, un rĂ©seau d’assistantes de service social rĂ©fĂ©rentes, des lieux de placement en maison de repos, des adresses de centre socio-Ă©ducatifs
 Bref, la rĂ©forme polyvalente de l’hĂŽpital est lancĂ©e avec cette jeune gĂ©nĂ©ration gĂ©nĂ©reuse et altruiste.

AgnĂšs Montagne



PremiĂšres urgences, un film de Éric GuĂ©ret. Production Haut et Court Doc. 1 h 40. En salles le 16 novembre.
(1) BD ‱ Un cocon pour les femmes
Voir aussi reportage Maison des femmes : attention, fragile
 dans Lien Social n°â€Ż1206, 2017, page 18, rubrique Fabrique du Social.