N° 753 | Le 19 mai 2005 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)

De l’âge de raison à l’adolescence : quelles turbulences à découvrir ?

Sous la direction de Catherine Bergeret-Amselek


éd. érès, 2005, (270 p. ; 23 €) | Commander ce livre

Thème : Adolescence

La vie humaine a été divisée au gré de l’histoire en quatre, sept ou douze périodes afin de faire correspondre le destin individuel aux quatre points cardinaux (ou quatre éléments fondamentaux), aux sept jours de la semaine (ou aux sept planètes du système solaire alors connues) et aux douze mois de l’année… La première césure semble être intervenue à 7 ans : c’est à ce moment que l’enfant quitte ses parents pour être placé comme valet dans d’autres familles ou est chargé de surveiller les troupeaux. Cette pratique se perpétue à l’ère industrielle : en 1840, sur un million d’ouvriers, on ne compte pas moins de 150 000 enfants. Il faudra plusieurs lois pour que le seuil d’entrée dans le monde du travail soit repoussé à 8 ans (1841), 12 ans (1874) et 13 ans (1892). Dès lors, 7 ans devient l’âge de l’entrée à l’école.

D’autres césures apparaissent dans l’histoire : 12 ans pour prêter serment, 15 ans pour devenir roi, seigneur, compagnon ou maître… Pendant longtemps, l’adolescence n’existe pas. Le mot signifie simplement « en train de grandir ». Pourtant, cette période de la vie ne va pas tarder à inquiéter : dès le Moyen Age des sociétés de jeunesse sont constituées afin de canaliser l’énergie et la violence inhérentes à cette période de la vie. Les XIXe et XXe siècles sont l’occasion d’un encadrement de la jeunesse au travers des patronages tant religieux que laïques. Aujourd’hui, si l’adolescence inquiète toujours autant, elle provoque aussi une réaction de fascination. Cette période de la vie attire tant les plus jeunes qui sont tentés de plus en plus tôt de l’imiter que les plus âgés, attirés par un dynamisme qu’il singe sous la forme d’une crise tardive de jeunisme. Pour autant, 85 % des sujets traversent cette époque de l’existence sans trop d’encombres. Les 15 % restant représentent quand même 800 000 individus ! On comprend donc que les manifestations impulsives parfois non contrôlées de cette classe d’âge puissent tracasser quelque peu les adultes.

C’est l’ensemble du cheminement qui va de l’enfance à l’âge adulte qui est l’objet de l’ouvrage dirigé par Catherine Bergeret-Amselek et qui regroupe les contributions de quinze auteurs différents. On y retiendra plus particulièrement les analyses portant sur la période de latence décrite par Freud et mise en doute avec finesse par l’un de ses successeurs (la confusion venant des caractéristiques d’une sexualité infantile tournée vers l’auto-érotisme est dominée par la pudeur et la discrétion). Mais aussi, l’analyse des œuvres de fiction confiant de plus en plus souvent à de jeunes adolescents la responsabilité de ramener l’équilibre planétaire perverti par des adultes irresponsables. Sans oublier, le parallèle établi entre la diabolisation de la lecture opposée autrefois au travail et le rejet aujourd’hui des jeux vidéo (dans un cas comme dans l’autre, les occupations juvéniles étant considérées comme encourageant la paresse et le mimétisme).


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