N° 656 | Le 6 mars 2003 | Patrick Méheust | Critiques de livres (accès libre)

De la complexité en prévention spécialisée

Daniel Lecompte


éd. L’Harmattan, 2002 (132 p. ; 12,20 €) | Commander ce livre

Thème : Prévention spécialisée

Évaluez ! Telle sera sans doute la future injonction à laquelle les responsables de service et les travailleurs sociaux devront se soumettre de bonne ou mauvaise grâce dans les années à venir. Il faut bien avouer que, trop souvent, cette « évaluation » se limite encore à la production d’un vague compte rendu annuel élaboré uniquement à partir d’éléments quantitatifs déclinés dans toutes les directions. Mais, ce qui est au cœur de l’évaluation, c’est-à-dire l’explication de la démarche entreprise, du contexte d’action, le rappel des objectifs retenus, la mesure régulière des écarts enregistrés entre ces objectifs et les réalisations, l’explicitation des réajustements opérés et les effets obtenus en fin de compte sont, la plupart du temps, ignorés dans ce qu’il est convenu d’appeler le rapport d’activité.

L’auteur du présent ouvrage, Daniel Lecompte, dirige un service de prévention spécialisée à la sauvegarde d’Eure-et-Loir. Riche d’une longue expérience de terrain, il se propose de fournir, à travers ce qui s’apparente à un petit traité de l’évaluation, outils méthodologiques et réflexions de fond afin d’aider les professionnels intéressés à mettre en ?uvre une démarche d’évaluation de leur travail digne de ce nom. Au-delà des objectifs généraux de la prévention, ceux énoncés par les textes de référence : « faciliter la promotion des jeunes et des familles et prévenir la marginalisation », l’évaluation doit pouvoir s’appuyer sur un diagnostic préalable faisant clairement apparaître les objectifs spécifiques au territoire d’intervention, formulés en tenant compte des « caractéristiques de la population, des phénomènes repérés, des problèmes à traiter, des moyens mis en ?uvre par d’autres partenaires », comme le souligne Daniel Lecompte.

Puis, l’essentiel se résume à associer l’ensemble des acteurs concernés dans un travail d’élaboration collective d’outils partagés de façon à faciliter une lecture commune (ce qui n’élimine pas la critique) de ce qui est entrepris. Dans ce sens l’évaluation aiguise la créativité et favorise l’exercice d’une certaine forme d’autonomie de même que la recherche de l’innovation. L’expression de D. Rollin, citée par l’auteur, est ici de circonstance : « L’évaluation dynamique, c’est un état d’esprit, une démarche avant d’être une méthode ». Voilà qui ne manquera pas de convaincre les plus frileux qui doutaient encore du bien fondé du processus ! Plus concrètement peut-être, gageons qu’effectivement l’évaluation permet « de favoriser les convergences de vue et la coopération entre des acteurs politiques, administratifs et associatifs ». Ce n’est déjà pas si mal ?