N° 872 | Le 14 février 2008 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)
Quelle voie emprunter pour réussir sa vie ? Entre la vision hédoniste (le plaisir comme bien suprême) et la conviction eudémoniste (atteindre l’objectif qu’on s’est donné), l’auteur refuse de choisir : « Ni le bien-être, ni le sens ne sont suffisants pour qualifier positivement la vie d’un individu » (p.39). Il préfère nous proposer une synthèse entre la quête de soi et la recherche de l’autre. Il s’appuie sur les travaux de la psychologie humaniste pour démontrer que le bonheur passe à la fois par les relations affectives, par les valeurs et par l’action.
Premier ressort donc, ce qui nous relie positivement aux autres et qui passe tantôt par l’amour, tantôt par l’amitié, « deux composantes majeures des relations humaines susceptibles de donner du sens à l’existence d’un individu » (p.98). Il est bien difficile de distinguer clairement ces deux sentiments. Le plaisir de se trouver ensemble, de partager des émotions, l’engagement réciproque… sont autant de caractéristiques qu’ils ont en commun. Ce qui les sépare n’est guère plus large qu’un lit partagé.
Second ressort d’une vie réussie, les valeurs porteuses. Que la démarche soit introspective, au travers de l’écoute de ce que l’on ressent ou qu’elle soit exploratoire, par la recherche de l’expérimentation de situations nouvelles, la poursuite de sens est spécifique à l’homo sapiens. C’est spontanément qu’il tend vers la créativité artistique, les réflexions métaphysiques ou la spiritualité (qu’il ne faut pas réduire à la religion) comme support à son épanouissement personnel. Sa capacité de transcendance peut lui permettre de transformer les épreuves et les traumatismes en démonstration de force. Un drame personnel peut tout autant l’anéantir que révéler l’existence de compétences latentes pas toujours conscientes, donner une confiance à toute épreuve ou encore acquérir le sentiment que l’espoir est toujours permis.
Mais il reste un dernier ressort tout aussi essentiel : l’engagement dans l’action. Ce qui importe alors est moins le succès obtenu ou l’objectif réalisé que la démarche, l’effort, le progrès vers la cible. Ainsi le travail accompli dans son métier peut apporter bien des satisfactions et pas seulement pour les revenus qu’il procure. Tout autant pour les relations sociales qu’il permet d’entretenir, mais aussi pour le sentiment d’utilité personnelle qu’il apporte, sans oublier le sentiment de responsabilité qu’il assure. La question n’est peut-être pas tant la nécessité de réussir sa vie que de réussir dans sa vie. « Je fais partie des personnes qui pensent que notre existence individuelle n’a pas un sens prédéterminé, que nous ne sommes pas marqués par l’emprise d’un inéluctable destin. Mais je suis tout aussi convaincu que chacun de nous est appelé à construire pas à pas le sens de sa vie » (p.281). Voilà bien un pas que nous emboîtons volontiers derrière l’auteur.
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