N° 1091 | Le 31 janvier 2013 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)
Pour éviter, comme cela arrive fréquemment avec tout nouveau concept, que la notion de « développement du pouvoir d’agir » ne soit galvaudée, il faut en préciser le contenu. C’est ce que nous propose l’Association pour promouvoir l’approche centrée sur le développement du pouvoir d’agir à laquelle se réfèrent les auteurs de l’ouvrage.
Cette nouvelle méthodologie est apparue dans un contexte marqué par de profondes mutations tant de notre cadre sociétal que des conditions d’exercice de l’action sociale. Le délitement socio-économique dû aux effets de la mondialisation et du néolibéralisme a eu pour conséquences d’accélérer la précarisation et l’exclusion. Le travail social ne s’adresse plus seulement aux laissés-pour-compte de la croissance, mais aux victimes d’une cris, qui étaient, jusque-là, socialement et professionnellement intégrées. Les pratiques traditionnelles centrées sur les seuls usagers ayant pour inconvénients majeurs de psychologiser et d’individualiser les souffrances, ne permettent plus de peser sur des problématiques qui, en impliquant l’environnement et les institutions, dépassent la seule dimension personnelle.
Le développement du pouvoir d’agir propose de répondre à ce contexte, en incitant l’usager à se prendre en charge. Cette approche nécessite un changement fondamental de posture de la part de l’intervenant qui doit renoncer au présupposé d’expertise et prendre en compte des connaissances expérientielles des personnes et des groupes. Chacun étant en capacité de tirer des leçons de ses expériences de vie, les plus démunis ne sont pas que des personnes à qui enseigner, elles sont aussi des sources de savoir. Il ne s’agit donc plus de faire émerger un besoin et de définir un plan d’action pour y répondre en s’appuyant sur le savoir-faire d’un intervenant, mais d’associer celui que l’on veut aider.
Dans cette démarche, l’impuissance affichée par le professionnel n’est pas un échec mais la condition de l’action, puisqu’il n’est plus alors en position de seul détenteur de la compétence nécessaire, de contrôle ou de sauveur, mais il devient le collaborateur de l’usager. C’est la fin de l’opposition entre d’un côté celui qui sait comment faire et, de l’autre, le consommateur passif d’une aide. Ce qui importe le plus relève d’abord de la participation et de l’investissement du sujet à l’élaboration de sa problématique et à ses propres solutions, ensuite de l’accroissement de sa capacité technique à y participer, du développement de son estime de soi permettant d’y croire et enfin du déploiement de la conscience critique de ses atouts et des ses fragilités. C’est ce à quoi le professionnel doit s’atteler.
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