N° 1151 | Le 13 novembre 2014 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)
Des adolescents ou jeunes adultes jetés à la rue par leur famille, à cause de leur orientation homosexuelle, ce n’est pas une exception dans notre pays. À preuve, l’explosion du nombre de demandes d’accueil reçues sur une année par le Refuge, cette association les hébergeant et les accompagnant depuis 2003 : en dix ans, elles sont passées de 25 à 930.
Frédéric Gal, son directeur général, signe un livre dénonçant l’homophobie, cette flétrissure visant une population pour la seule raison qu’elle n’est pas dans la norme. Tout ce qui ne passe pas sous les fourches caudines de l’hétérosexualité est, au mieux méprisé ou moqué, au pire durement réprimé ou chassé. Pendant des siècles, l’homosexualité fut considérée comme une déviance tant par les religions que par la morale ou la science. C’est finalement très récemment que le poids de cette stigmatisation a commencé à se faire un peu moins sentir, l’Organisation mondiale de la santé ne retirant cette orientation de la liste des maladies mentales qu’en 1990.
Mais les victimes sont encore trop nombreuses à en subir les effets. Après avoir replacé cet ostracisme dans un contexte historique, l’auteur en décrit les effets délétères sur l’estime de soi et l’insertion dans la vie adulte, se traduisant par des conduites addictives ou la prostitution, la dépression ou des tentatives de suicide. Prendre en charge ces jeunes gens passe par le soin apporté à la gestion tant de leur solitude que de leurs réflexes homophobiques intériorisés, ou encore aux graves carences affectives subies. Ce qui leur est proposé, c’est un cadre sécurisant et strict les accueillant hors de tout jugement de valeur moral et qui leur permet d’accéder au droit commun, de rechercher un emploi et ensuite un logement : en fait, leur permettre de retrouver la place qu’ils n’auraient jamais dû perdre.
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