N° 638 | Le 17 octobre 2002 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)
Membre du groupe de travail dirigé par le professeur Houzel, l’auteur développe ici les trois dimensions de la parentalité à l’élaboration desquelles il a contribué.
L’exercice tout d’abord de la parentalité renvoie aux dimensions idéologiques et symboliques : chaque société détermine les attributions relatives au statut de parent. Il n’y a là aucune espèce d’universalité : depuis l’autorité sur l’enfant non exercée par le géniteur jusqu’à la coutume polynésienne consistant à donner le premier né à la grand-mère maternelle pour compenser le départ de sa fille, en passant par l’esclave de la Grèce antique servant de mère porteuse, le rôle du parent est fonction des sociétés et des époques.
Vient ensuite la pratique de la parentalité : les croyances et représentations là aussi particulières à chaque société fixent des règles d’authentification des conduites et attitudes parentales à l’aune desquelles chacun peut se comparer. Les normes changent : si ne pas battre son enfant était autrefois ne pas l’aimer, aujourd’hui, la norme veut qu’on lui parle et qu’on l’écoute, chose inimaginable autrefois.
Quant à l’expérience de la parentalité, elle s’appuie sur les processus inconscients et expériences intersubjectives. Le fait de devenir parent constitue une étape maturative de l’existence : le rapport à soi, l’identité psychosociale, la relation à autrui et à ses propres parents s’en trouvent modifiés. C’est tout particulièrement à l’expérience de la parentalité que l’auteur s’attache en illustrant cette dimension grâce aux concepts psychanalytiques. Il y est question de « l’idéal du moi qui relie le complexe imaginaire responsable du désir d’enfant à d’autre que soi, à l’inverse du moi idéal, qui imprègne ce complexe d’un désir tourné vers une quête ontologique et de réparation » (p.36). Un dysfonctionnement familial interviendrait dès lors que chacun des parents inverserait l’ordre de primauté des formations narcissiques inhérentes à sa position spécifique : le père investissant le moi idéal (en lieu et place de l’idéal du moi) et la mère le contraire.
L’ouvrage développe un certain nombre d’autres troubles de la parentalité liés aux remaniements du versant narcissique de la personnalité. Difficultés des mères psychotiques à investir les besoins objectifs du nourrisson (soins, nourriture ?) et des parents en situation d’état limite à investir subjectivement l’enfant ? Sans oublier l’organisation perverse de la famille amenant un père à se considérer sur un même plan que ses enfants et l’organisation paranoïaque ou ce même père met à distance mère et enfants en réprimant toutes leurs velléités d’autonomie. Accompagnement de la maternité, soutien de proximité et développement de la psychiatrie périnatale sont les maîtres mots présentés ici comme les axes du traitement de la parentalité.
Dans le même numéro
Critiques de livres