N° 612 | Le 7 mars 2002 | Patrick Méheust | Critiques de livres (accès libre)
En 1989 naissait dans la région Midi-Pyrénées la revue Empan, fruit de la collaboration de praticiens de l’éducation, de la santé et du social, réunis autour d’un même projet, celui de communiquer à travers l’écriture. Ce livre est en quelque sorte un regard sur le chemin parcouru puisqu’il reprend un certain nombre d’articles publiés dans la revue au cours des dix dernières années. D’inspiration sociologique, psychologique, voire philosophique, des thèmes aussi divers que l’action sociale et éducative, les institutions et les lieux de pratique, de même que les spécificités de la vie associative sont ainsi abordés.
Ces textes constituent, au final, une sorte de recueil de références que tous les professionnels auront plaisir à consulter. Parmi les questions d’ordre général, on appréciera l’approche de l’exclusion telle que présentée par le sociologue M. Chauvière. Celui-ci, en effet, souligne que l’invention d’un tel concept a eu pour conséquence perverse de faire intérioriser l’idée qu’il existe dans toute société un hors social. De la sorte, il devient plus « confortable » de traiter les problèmes liés à l’exclusion plutôt que de se donner pour objectif une réelle intégration des populations en difficulté dans les normes républicaines, et ce en matière de droit au travail, au logement, etc.
Sur le plan des concepts, encore, les développements de JC Lorthe autour des notions de pouvoir et de direction séduiront ceux qui, en position d’exercer une autorité hiérarchique, s’interrogent sur ses mécanismes. « Le pouvoir rencontre l’obéissance par la potentialisation de la violence légitime qu’il concentre en son sein », nous dit l’auteur, tandis que diriger est une fonction essentiellement orientée vers l’action, dans le sens de « conduire, guider et administrer ». Peu de domaines échappent à l’examen des rédacteurs de l’ouvrage. Le concept de « réseau » par exemple, très prisé de nos jours, est également à l’honneur. Le lecteur sera intéressé d’apprendre que le réseau est « horizontal, partenarial, hybride, redondant, négocié » alors que le système, lui, est « hiérarchique, rigide, procédurier, officialisé, irréversible ? ». Fuyons donc le système pour chercher refuge dans le réseau ! Sans hésitation ?
Mais trêve de plaisanterie, outre les exercices conceptuels, le livre propose aussi de multiples récits d’expérimentations dans le domaine social qui retiendront l’attention des lecteurs avides de nouvelles idées. Nous pouvons donc souscrire, sans arrière pensée, à la formule qu’utilise Rémy Puyuelo lui-même pour caractériser son ouvrage. Il s’agit bien, en effet, d’un outil à penser et à agir le futur en prenant la mesure de l’humain.
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