N° 847 | Le 5 juillet 2007 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)
Le premier numéro de la série de recueils que l’association Non-violence actualité vient de publier est vraiment une réussite. Cette compilation d’articles et d’interviews parus dans la revue éponyme permet une compréhension fine et intelligente du thème choisi. Jusqu’à la moitié du XXe siècle, y explique-t-on, les adultes, tant à l’école qu’en famille, avaient l’habitude pour se faire obéir des enfants de les frapper (fessée, coups divers…), de les isoler (piquet, cachot) ou de les humilier (le bonnet d’âne). On pensait alors que seule la peur des représailles pouvait leur permettre de se soumettre et de ne pas récidiver, seuls les privations ou les sévices étaient à même de produire le changement de conduite attendu et la prise de conscience souhaitée.
Dans les décennies qui suivirent, une tentation inverse s’est progressivement imposée : on a pu croire, par peur du conflit ou par rejet de toute attitude répressive, qu’il ne fallait par réagir aux transgressions des enfants. Aujourd’hui, on considère à juste titre que la pire des violences qui puisse leur être faite serait de les abandonner dans un espace sans limites et sans repères. Mais c’est bien à tort que l’on croit pertinent de réhabiliter la punition. S’il est essentiel que l’enfant soit repris pour lui apprendre la nécessité des règles du vivre ensemble et l’amener à assumer les conséquences de ses actes, il n’est point utile pour autant d’employer des méthodes punitives qui s’avèrent bien plus être des représailles et des vengeances de la part d’adultes que des moyens efficaces pour amener l’adoption d’un code de conduite positif. Toute autre est la démarche de la sanction éducative qui, pour être ferme et résolue, n’en propose pas moins face aux transgressions enfantines une réponse claire tant au civil (réparation des dommages) qu’au pénal (mesure de rétorsion au regard de la règle qui n’a pas été respectée), sans oublier la dimension éducative (puisqu’elle s’accompagne systématiquement d’une réflexion sur les raisons qui ont amené à transgresser).
Il n’y a pas ici la moindre concession à un quelconque laxisme. Les adultes doivent se montrer capables de frustrer, d’interdire, de mettre des limites d’une manière résolue et juste, sans avoir à basculer pour autant dans la cruauté, dans un rapport de force déséquilibré basé sur le pouvoir du plus fort ou dans le règlement de compte. Il s’agit ni plus ni moins de montrer que l’obéissance n’implique pas la soumission humiliante, que l’éducation ne se réduit pas au dressage et que la fermeté ne s’oppose pas au respect. Simplement, « pour amener l’enfant à plus d’humanité, la sanction doit être compatible avec la dignité humaine » (p.59). Dès lors, faire preuve à la fois de détermination et de bienveillance permet à l’enfant de comprendre que la loi et l’affection qu’on peut lui prodiguer ne sont pas contradictoires mais qu’au contraire, l’une et l’autre sont nécessaires à son épanouissement.
Dans le même numéro
Critiques de livres