N° 630 | Le 18 juillet 2002 | Patrick Méheust | Critiques de livres (accès libre)
Si la séparation des membres d’une même famille est un phénomène qui doit se produire un jour et qui participe naturellement de l’autonomisation des enfants, l’incarcération d’un des parents constitue au contraire une rupture susceptible de provoquer de graves traumatismes. La mise en détention soudaine du père ou de la mère interrompt en effet brutalement le processus de construction par l’enfant d’une représentation de son parent. Cette brusque cassure peut générer des points de fixation et compromettre la stabilité des attachements futurs. Aussi est-il important de préserver pour l’enfant la possibilité de poursuivre une relation avec le parent absent de façon à ce que le travail d’élaboration mentale perdure dans une certaine continuité en évitant les cristallisations imaginaires (déification ou, à l’inverse, diabolisation).
La fédération des relais enfants-parents qui regroupe treize associations régionales impliquées dans trente-six établissements pénitentiaires a pour objectif de contribuer à maintenir le lien entre l’enfant et son parent incarcéré. L’enfant, pour ce qui le concerne, n’a pas à subir une sanction qui le priverait de la possibilité de voir son parent et le droit de continuer à entretenir une relation familiale en dépit des circonstances constitue, de ce point de vue, un impératif tout à fait fondamental.
D’autre part, il semble évident que dans une perspective de réinsertion future, la permanence des liens familiaux pour les personnes détenues constitue un facteur particulièrement favorable. La faculté offerte de continuer à exercer une autorité parentale contribue puissamment à responsabiliser des individus par ailleurs soumis, du fait de l’incarcération, à des forces de marginalisation qu’il ne faut pas mésestimer. Il importe donc que le parent détenu puisse conserver une fonction éducative, même restreinte, envers son enfant. Les bénévoles et professionnels qui souhaitent s’impliquer dans les relais enfants-parents doivent cependant bien mesurer l’ampleur de la tâche.
Outre la rencontre avec le milieu carcéral, ce type d’accompagnement invite à la découverte d’une famille traversant une période particulièrement délicate. L’engagement requis n’est donc pas une mince affaire et suppose des qualités sur le plan psychologique que les associations s’efforcent d’évaluer avant de « valider » les candidatures. Notons enfin que les expériences d’accompagnement enfants-parents intéressent de plus en plus les pouvoirs publics. Il y a maintenant un réel espoir que la prochaine réforme pénitentiaire les prenne en compte. Une nouvelle fois, l’initiative associative aura permis de faire avancer les choses positivement.
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