N° 623 | Le 30 mai 2002 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)
S’il est bien un thème qui a fait recette dans la dernière décennie, c’est celui du « développement social ». Philip Mondolfo nous le présente ici d’une façon passionnante et dépassionnée. Il a évité avec bonheur la dispute des anciens et des modernes. Ainsi, évoque-t-il le modèle qui a prévalu depuis la libération, basé sur le respect de l’intimité de l’usager et le colloque singulier avec le professionnel. Loin de le stigmatiser, il lui reconnaît ses lettres de noblesse quand il rappelle les valeurs de la notion d’assistance : une personne bénéficie, à un moment difficile de sa vie, d’une attention plus soutenue, d’une écoute, d’un repos, d’un refuge lui assurant la restauration de la confiance en soi et l’élaboration d’un projet de vie reconstructeur. Aux côtés de cette dynamique dite psychosociale individuelle, s’est développée une approche complémentaire : le développement social.
Ce concept trouve ses racines dans la vision d’une société qui ne se définit pas à partir de la seule production mais qui recherche le mieux-être des populations, à partir des dimensions environnementales, culturelle, sociale et politique. Le social s’est emparé de ce concept dès lors qu’est apparue la nécessité de ne pas se limiter à la seule transformation de la personnalité et d’apporter des modifications notables à l’environnement. Ce qu’il s’agissait alors de faire, ce n’était pas tant de demander plus de moyens que de mobiliser les ressources existantes, souvent peu ou mal exploitées, en les coordonnant et en les mettant en réseaux. Les principes qui émergèrent alors ont fait référence tant à la participation des populations qu’à la mobilisation des potentialités endogènes, à la transversalité des différents acteurs, qu’à la modification des relations entre professionnels et usagers.
Ces derniers devenaient alors partenaires et acteurs, les premiers mettant à la disposition des seconds leurs compétences, pour que ce soit eux qui trouvent leurs propres solutions. Une telle démarche implique inévitablement une redéfinition de la distance et de l’implication, de la proximité et de la bienveillance nécessaire.
Autre conséquence : autorité politique et hiérarchie ne se positionnent plus tant comme prescripteurs que comme ressources pour des professionnels eux-mêmes à l’écoute des besoins des populations. Une telle révolution culturelle nécessite une modification des pratiques. L’auteur écarte toute spécialisation qui par la segmentation de l’action, provoquerait inévitablement un morcellement du sujet.
Non, il propose plutôt une externalisation de certaines tâches telles que la fonction accueil, l’information donnée sur la simple réglementation ou certaines activités purement administratives qui pourraient être confiées à des professionnels formés pour ces fonctions et qui agiraient en étroite collaboration avec les travailleurs sociaux. Le temps ainsi dégagé pourrait alors être mieux articulé entre action individuelle et développement social.
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