N° 637 | Le 10 octobre 2002 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)
Il en va dans ce recueil des interventions des journées proposées par l’IFREP en mars 2001, comme dans tout compte rendu de colloque : on y trouve des propos passionnants et d’autres qui le sont bien moins, hasard des intervenants qui ont des choses à dire et d’autres qui font plus dans le remplissage. Plusieurs axes développés ici méritent néanmoins qu’on s’y attarde.
Ainsi des conditions évoquées pour prévenir les rapports de violence dans les internats éducatifs : appréciation par le magistrat de la faisabilité et de l’opportunité de la mesure de placement (au vu du degré d’adhésion du jeune et de sa famille et de la solidité ou de la fragilité éventuelle de l’équipe chargée d’assurer l’accueil), le climat relationnel, les choix pédagogiques, la procédure d’admission ainsi que les conditions architecturales de la structure d’accueil (état des lieux, propreté, petite unité, chambre individuelle etc.), transparence des règles de fonctionnement et ouverture de l’institution sur l’extérieur, qualité de l’encadrement (professionnels formés bénéficiant d’un travail d’équipe et d’une circulation de la parole, diversification des solutions possibles etc.). Toutes ces circonstances peuvent tout autant endiguer que favoriser une atmosphère propice aux dérapages.
Mais le rapport à la violence subie ou agie est aussi à resituer dans la façon dont l’accompagnement du jeune réagit sur le propre fonctionnement de l’éducateur. On ne mesure jamais vraiment ce danger pour les intervenants « d’être happés par les dysfonctionnements familiaux et de devenir à leur insu, partie intégrante du système qui malmène les enfants » (p.55). L’impact désorganisateur de la psychopathologie familiale peut prendre trois formes : le registre indifférencié (la confusion qui règne au sein de la famille entraîne, par contagion, l’imbroglio de l’intervention), le registre clivé (le professionnel se retrouvant prisonnier des projections de bons ou mauvais objets), enfin le registre non-distancié (identification à tel ou tel sujet).
Ces ressentis doivent apparaître comme autant d’instruments de travail, le cadre contenant institutionnel devant jouer le rôle d’enveloppe protectrice permettant de préserver l’intégrité psychique de l’intervenant.
On retrouve ces modulations face à des adolescents qui requièrent la distance nécessaire pour leur éviter le sentiment d’une intrusion dans leur intimité (avec les risques induits d’hétéro-agressions), mais aussi la proximité suffisante pour leur éviter le sentiment d’abandon et de lâchage (avec comme conséquence toujours possible des actes auto-agressif, de toxicomanie ou même de suicide). Difficile exercice que cet entre-deux.
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