• TERRAIN - Journal de bord - Brèves de comptoirs éducatifs non confinées (2)
Les mots claquent, les réflexions font sourire, la révolte fait vibrer … Eric Jacquot, responsable de lieu de vie, nous adresse ses brèves de comptoir percutantes.
J’ai une équipe d’enfer, ils sont là au front dans des conditions difficiles et ils assurent. J’ai aussi une pensée toute particulière pour une stagiaire qui fait en ce moment compliqué, une chose qu’elle n’avait pas prévue et dont elle se souviendra toute sa vie. Bravo mes potos avec vous je me sens moins seul et c’est du bonheur de vivre à distance mais avec vous, cet instant si particulier.
A la fin, on fêtera ça, sans gants ni protocole et avec une prime. Faudra que j’en parle quand même au conseil d’administration de l’association et comme je l’écris ici, un fonctionnaire consciencieux pourrait en prendre ombrage.
Histoire de confinement : hier les zenfants m’ont mis à la porte de chez moi et ils m’ont dit que je pouvais fuguer.
Un enfant quand il est confiné son estomac parle pour lui.
Ronaldo 13 ans " Eric je ne voudrais pas que tu sois mon père mais j’aimerais bien être à la place de ton fils." Si là, il n’est pas question de transfert, c’est à ne plus rien y comprendre.
Le confinement c’est s’en sortir sans sortir.
Je n’impose aucun devoir scolaire, alors ils les font d’eux-mêmes. Ils n’ont pas envie de mourir cons.
« Je ne peux pas vous laisser dire cela » c’est la première réponse d’un technocrate à quelqu’un qui viendrait contre dire sa science infuse.
La question n’est pas celle-là. C’est comme cela que les gens qui savent, prennent la parole.
Cette question du confinement et des retours en famille de certains enfants placés par l’aide sociale doit amener à une vraie réflexion autour du sens du placement.
Interrogeons aussi les droits aux autorisations d’hébergement sur des week-ends. A certains parents, on leur demande d’être plus que parfait. Pour moi c’est du passé décomposé et moi qui est l’imparfait, on me confie leurs enfants !
Nos pratiques doivent se nourrir de l’expérience et non pas des évaluations pourrait valider Roland Gori.
Les LVA sont les structures, les mieux adaptées à la crise. Nous avons une grande souplesse d’adaptation. On sait ce que c’est que d’être dans le dur. Les grandes amplitudes horaires on connait déjà, l’abnégation et la non reconnaissance de notre travail aussi.
Hier un des garçons m’a dit, je vais appeler le 119. Je lui ai demandé pourquoi, il m’a dit t’inquiète pas, c’est juste pour dire que l’Etat te maltraite !
En période de confinement à 4, la solitude est une maladie honteuse.
Tiens, on est en avril et un département ne m’a pas payé les prix de journée pour 3 enfants depuis décembre. En période de confinement, il faut avoir les nerfs solides. Les enfants sont du bonheur, les services placeurs des machines à broyer mêmes les meilleures volontés.
Ils nous confinent même au niveau pognon.
« Eric, t’arrêtes de nous piquer, toutes nos bonnes idées pour en faire des brèles. ».
En novlangue, stabilisation de la courbe signifie entre 400 et 800 morts par jour.
Entre les normes administratives et le COVID qui est le plus rapide ?
Un mec intelligent de l’ARS qui annonce 600 suppressions de postes à l’hôpital de Nancy en ce moment me laisse dubitatif sur la question de l’intelligence et de la culture hors-sol.
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Retrouvez les témoignages de travailleurs sociaux en pleine crise sanitaire sous la thématique "Terrain, journal de bord" de notre rubrique Actualité.
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