• TERRAIN - Journal de bord - Futurs diplômés et déjà les manches retroussées La nécessité de faire appel aux étudiants en travail social.
Par Fioravanti Julie, éducatrice spécialisée en formation au sein d’Etcharry Formation Développement (établissement de formation en travail social basé au Pays Basque).
Depuis le 25 mars 2020, la commune de Bayonne a ouvert un centre de confinement pour les sans- abris situé dans la salle Lauga et piloté par l’association Atherbea.
Le gymnase accueille des sans-abris afin d’assurer leur protection et les confiner pendant cette période de pandémie. Toute une équipe de bénévoles et salariés s’organise en cette période de confinement qui n’est évidente pour personne. Ce contexte actuel, pour le moins inédit nous fait travailler ensemble avec une équipe dynamique, volontaire, prête à coopérer pour et avec toutes les personnes accueillies.
La réserve sociale a su profiter de nous tout comme nous avons su nous en saisir et profiter d’elle.
Les matinées sont rythmées par le service au comptoir où le petit-déjeuner est servi.
Chacun vaque à ses occupations et laisse le temps au temps. Les repas sont servis par les équipes qui effectuent un roulement afin d’être au rendez-vous matin, midi et soir.
L’équipe d’étudiants bénévoles d’Etcharry Formation Développement, toutes formations confondues, se mobilise dans le cadre de la réserve sociale auprès des acteurs du secteur professionnel, comme Atherbea. Toujours dans le but de tenter de faire lien avec cette période et continuer de s’investir en tant que futurs travailleurs sociaux.
Nous avons tous à nos débuts, tâté le terrain, échangé, observé et en fonction des besoins, nous organiser. Grâce à de nombreux dons, nous avons aussi pu recevoir des bouquins, de la papeterie afin que, ceux qui le souhaitent puissent laisser aller leur imagination grâce à des supports.
Nous sommes conscients que le confinement est loin d’être facile mais tâchons de faire au mieux, en fonction des aléas.
Les personnes accueillies développent le même engouement que nous tous à profiter du plein air lorsque le temps est au beau fixe malgré les conditions d’isolement. Au programme, tennis de table, badminton, ateliers manuels, cours de français, skateboard, jardinage et ateliers d’écritures. Au cours de ces derniers, les personnes accueillies se dévoilent timidement, en groupe. Tout le monde s’applaudit, rit.
Malgré certains coups durs, un sentiment de communauté plane aux dessus de nos têtes. Ce qui pourrait paraître comme un simple exercice d’écriture a finalement permis de mettre des mots sur des ressentis, pas toujours évident à partager : « ça fait du bien de pouvoir s’exprimer autrement, ça me permet de moins être penché sur la bouteille » nous révèle un accueilli.
Nous leur avons proposé un atelier appelé : « SI TU ÉTAIS FACE AU COVID-19, QUE LUI DIRAIS-TU ? ».
Nous le savons, il est parfois difficile de se livrer de façon conventionnelle. Laissons donc place à l’inventivité, nécessaire pour divertir et égayer ce quotidien pour le moins inhabituel.
En voici un exemple :
Pour toi, ennemi public numéro 1 :
Je ne comprends pas les raisons de ton existence mais je peux imaginer tes motivations, ou celles de ton créateur. A toi, organisme unicellulaire malin, toi qui es si insignifiant et qui a besoin d’un corps humain comme réceptacle pour déverser cette vague de haine et de mort.
Puis-je te poser une question ?
Es-tu le fruit d’un esprit pervers aux intentions politico-économiques ou es-tu envoyé comme une punition pour l’état de notre planète ?
A toi, dictateur universel qui est dans l’ombre, crois-tu que ton pouvoir et ton argent vont te sauver ? vas-tu pouvoir dormir sur tes deux oreilles ?
Malheureusement, je suis certain que oui.
Mais je ne veux pas m’égorger ou divaguer sur tes modes opératoires.
Parlons de ce qui compte réellement.
A toi, germe mortel, je te demande de donner une deuxième chance à l’être humain. Moi qui suis un simple écrivain, bohème et rêveur, qui croit fermement en la cohabitation entre la faune, la flore et la race humaine.
Je te demande pardon. Pardon pour la tragédie de Tchernobyl, la catastrophe de Bhopal, les incendies pétroliers du Koweït, l’inondation du fleuve jaune, le grand smog de Londres, la grande bousculade de la Mecque, les milliers de corps échoués dans la Méditerranée, la déforestation et les récents incendies de l’Amazonie, et toutes les autres innombrables erreurs humaines qui durant des siècles ont affaibli ma chère planète bleue.
Je te demande d’offrir une opportunité à l’être humain. Je suis conscient de notre désobéissance et tu as des raisons de vouloir nous exterminer. Tu as des raisons de vouloir que les fleuves reprennent leur lit, rasant toute trace humaine sur leur passage, que la faune et la végétation engloutissent des villes et ainsi, Mère Nature puisse respirer, sereine et soulagée.
Mais je t’en prie, j’implore ta clémence, aie pitié de nous, pour ne pas que les innocents expient pour les pêcheurs.
Si tout ceci est une leçon, je pense que nous l’avons compris.
Cordialement,
Une personne amoureuse de la vie qui croit ardemment en la paix mondiale et en l’être humain.
Merci de m’avoir écouté
J.S, Homme, 34 ans.
Lettre originale rédigée en Espagnol, traduite en Français.
Nous partageons, depuis maintenant plus d’un mois, la vie de plusieurs personnes réunies. Condensée dans un gymnase. Il suffit d’accrocher un regard, adresser un simple bonjour, et nous pouvons réussir à amorcer une discussion.
Je tiens à remercier toutes les personnes qui ont contribué, à ce quotidien en étant présent et solidaires. Un grand merci à tous les bénévoles, avec lesquels ce fut un réel plaisir de travailler. Un véritable fondement moral s’est établie, qui renvoie à la conscience collective de groupe et à son implication qui en découle et fait de nous des travailleurs sociaux toujours plus impliqués.
Merci à tous les salariés qui apprennent à gérer cette situation d’urgence au quotidien et travaillent avec les moyens mis en place.
Il suffit d’accrocher un regard, adresser un simple bonjour.
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Retrouvez les témoignages de travailleurs sociaux en pleine crise sanitaire sous la thématique "Terrain, journal de bord" de notre rubrique Actualité.
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