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• TERRAIN - Journal de bord - « Nous avons créé un cocon »

Par Camille FLATREAUD, Educatrice de jeunes enfants
Lundi 23 mars 2020

Notre lieu de vie accueille sept enfants souffrant de troubles psychologique et/ou du comportement. Ils étaient scolarisés en "Institut médico éducatif", en "Unités localisées pour l’inclusion scolaire" ou en classe d’intégration jusqu’à la fermeture de leurs établissements. Dès que le confinement a été décidé, l’équipe a choisi de passer en régime de vacances d’été. Le matin, nous assurons une activité scolaire, l’après-midi nous proposons des ateliers créatifs, sportifs et ludiques. Nous avons, en plus, la chance d’avoir un jardin où les enfants peuvent jouer. Étant donné leur pathologie, nous sommes attentifs à respecter un planning ritualisé avec des repères identifiables dans le temps, ce qui permet de les apaiser et de les contenir. Nous sommes, chaque jour, trois en permanence avec eux. Les référents ASE, les psychologues qui suivent les enfants, l’hôpital de jour qui les
Accueillent se montrent disponibles uniquement par téléphone. Or, l’entretien téléphonique n’est pas vraiment une solution pour ceux qui ont besoin de soins. Les enfants que nous accueillons ont pu garder contact avec leurs familles par courrier et par téléphone, les visites médiatisées ayant été suspendues.
Si tout se passe bien pour l’instant, c’est parce que nous sommes une petite équipe soudée qui sait partager ses émotions et communiquer sur ses conflits (inhérents à tout collectif), tournée vers le même objectif : répondre aux besoins des enfants que nous accueillons. Mais, il ne faut pas aussi oublier la composition actuelle du groupe : aucun enfant n’est violent, comme cela peut se passer parfois, ce qui pourrait alors miner la stabilité de notre lieu. Les sept professionnels de l’équipe ont fait le choix de privilégier leur travail. Aucun ne s’est mis en arrêt, ni n’a fait valoir son droit de retrait. J’ai moi-même envoyé mes deux filles chez leur père, en leur expliquant qu’il fallait que je m’occupe des enfants qui n’avaient pas la chance d’avoir une famille sur qui compter. A titre personnel, ce n’est pas simple à vivre, les contacts par Skype ne remplaçant pas la vie de famille. Au niveau professionnel, nous sommes à flux tendu, avec un risque d’épuisement. Que se passera-t-il si un enfant ou un éduc’ tombe malade ? Nous ne disposons ni de gel, ni de gants, ni de masques, juste une chambre qui peut servir à l’isolement. Heureusement, nous sommes soutenus par le Président de notre association qui va essayer de trouver des relais pour nous seconder. Mais l’arrivée d’une nouvelle personne perturberait le groupe d’enfants. L’équilibre que nous avons trouvé pourrait vite devenir précaire. Et si la situation a pu être bien gérée la première semaine, nous sommes beaucoup plus inquiets, en cas de prolongation sur six semaines, comme l’information nous en est parvenue.

Retrouvez tous les jours les témoignages de travailleurs sociaux en pleine crise sanitaire sous la thématique "Terrain, journal de bord" de notre rubrique Actualité.

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