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Tout est parti d’une rencontre entre Ludovic Dardenne, le Directeur de l’association nantaise Permis de construire qui accompagne la réinsertion des personnes sous main de justice, et Romain Godard, le skipper de Tous en mer association à la fois nantaise et itinérante qui s’attache à faire découvrir la navigation aux enfants, aux ados et aux familles des quartiers prioritaires. Il n’a pas fallu beaucoup de temps pour que ces deux-là mesurent combien ils se retrouvaient autour des mêmes valeurs : promotion du vivre ensemble, mise en valeur des compétences trop souvent inemployées, valorisation de l’estime de soi etc... Ils n’hésitent guère longtemps avant de concevoir un projet commun : organiser une sortie en mer avec le public accompagné. Nous sommes aux lendemains du confinement. Et, c’est vrai que le besoin de prendre un grand bol d’air devient pressant.
Les co-pilotes (c’est ainsi qu’on nomme les travailleurs sociaux à Permis de construire) fixent un certain nombre d’objectifs éducatifs aux participants : rompre leur isolement, être acteur avant, pendant et après, être utile à autrui et s’appuyer sur les autres.
Les pilotes (c’est ainsi qu’on nomme les personnes accompagnées à Permis de construire) répondent volontiers à la proposition de participer à ce projet. « Nous avons fixé avec chacun d’entre eux des objectifs individuels : pour les uns respecter les règles quand ils y sont plutôt rétifs, pour d’autres réussir à gérer leurs addictions (ni alcool, ni drogue à bord), pour ceux qui sont les moins sociables trouver leur place dans la vie de groupe », explique Anne Bertout, copilote.
Mais, ce n’est pas au pied levé que l’on s’improvise marin. Il faut quand même un minimum de préparation. Trois rencontres vont permettre de concevoir ensemble une chartre de vie commune, de programmer la liste de menus et des courses à effectuer et d’aborder tous les aspects techniques. Romain Godard viendra d’ailleurs expliquer le déroulement du séjour et répondre tant aux questions, qu’aux appréhensions : « cette rencontre m’a tout de suite rassuré. Il y a toujours un risque de partir avec un public non habitué. Mais en tant que marin, nous sommes habitués à en courir  » se souvient-il.
Finalement, cinq pilotes sont sur le pont le jour du départ. Le catamaran de onze mètres les embarque avec un co-pilote et le skipper. Ils vont naviguer du 6 au 10 juillet dans la baie de Quiberon entre les îles de Houat et d’Hoëdic « Il nous a fallu nous habituer à la vie en mer, en changeant nos habitudes » explique Justine Cauet, copilote présente dans l’équipage. «  Bien sûr, il y a eu le mal de mer, le trop plein de stimulations, l’absence de douche et des problèmes d’addiction. Mais le plus surprenant a été de constater les difficultés de sommeil des pilotes : insomnies, cauchemars … certains ne dormaient que deux heures par nuit. Cela a été une découverte pour nous  » continue-t-elle.
Pour autant, cette immersion « sportive » a réussi à dépasser les inévitables épreuves de la vie maritime. Elle a même constitué une véritable révélation pour chacun(e) des participant(e)s. Déstabilisé(e) par ce milieu inconnu, surpris(e) pas ses facultés d’adaptation, enthousiaste après un séjour éprouvant mais vivifiant, la plupart a vécu cette expérience en se découvrant et en découvrant les autres sous un œil différents qu’avant le départ. La magie d’un approche pédagogique qui ne place pas la priorité dans l’aspect technique de la navigation, mais avant tout dans le vivre ensemble a encore frappé. «  Ce n’est pas moi qui monte les voiles et tient la barre, mais les personnes que nous embarquons. Nous détectons leurs envies et essayons de les réaliser  », explique Romain Godard qui conclue « Quand vous constatez que la personne qui a passé toute une journée à vomir, ne veut plus lâcher la barre, à peine remise, vous vous dites que c’est gagné  »
Permis de construire a très envie de renouveler l’expérience, en programmant deux sessions par an. Et Tous en mer sera enchanté de l’embarquer à nouveau.

Ségolène Blois, elle aussi copilote, a monté une vidéo à partie de photos et d’une dizaine de petits films réalisés par les pilotes tout au long du séjour