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■ ACTU - Assises de la protection de l’enfance • Sur fond de mécontentement

Les assises de la protection de l’enfance organisées le 24 et 25 juin à Nantes, dont le thème était le "méta-besoin de sécurité" des enfants, ont dressé un bilan contrasté des effets de la crise sanitaire sur les enfants et les professionnels.

Maltraitances en hausse

Sur les maltraitances, l’ONPE – observatoire national de la protection l’enfance – a publié en mai 2020 une note montrant "une hausse de 56% du nombre d’appels au 119 entre mars et mai 2020, donnant lieu à 30% d’augmentation des informations préoccupantes". "Mais il s’agit de données partielles, et on manque d’études sur le sujet", souligne Magali Fougère-Ricaud, chargée de mission à l’ONPE. L’augmentation des violences sur le long terme inquiète également l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Une enquête rapide menée auprès de quelques départements montre en effet l’augmentation des informations préoccupantes et des placements d’enfants en 2021.

Effet positif nuancé sur les enfants

L’effet bénéfique du confinement sur les enfants confiés, avec "un constat d’apaisement repris dans plusieurs publications", note Magali Fougère-Ricaud, est toutefois à nuancer un an plus tard. « Les professionnels témoignent des effets différés du confinement, qui se traduisent maintenant par un mal-être en établissements médico-sociaux et des hospitalisations », ajoute-elle. Les enfants confiés ont été particulièrement impactés par la fermeture des écoles, qui s’est traduit par une hausse du décrochage et des difficultés scolaires. « Les effets sur la scolarité sont les plus importants, suivis de ceux sur la précarité et sur la santé mentale », résume Marie-Agnès Feret, chargée d’étude à l’Odas - observatoire départemental de l’action sociale.

Changements de pratiques professionnelles

Pour les professionnels, selon plusieurs études, le confinement a entraîné des changements de pratiques professionnelles, avec un "recentrage sur le cœur de métier", des relations "renforcées" avec les familles et des postures "plus égalitaires". L’usage du numérique a modifié le travail d’accompagnement. Si le confinement a obligé à "simplifier les procédures" et s’affranchir des normes, "ces allègements, jugés positifs", n’ont pas perduré, estiment une majorité de professionnels interrogés par l’Odas. Même chose pour les dispositifs innovants montés en urgence pendant le confinement - lieux d’accueil éphémères, mutualisation d’équipes, etc.

Intervention d’Adrien Taquet

Le secrétaire d’Etat Adrien Taquet est intervenu en duplex pendant les assises, mais "pour cause de période de réserve préélectorale", a très peu évoqué son projet de loi sur la protection de l’enfance, qui doit entrer en commission la semaine prochaine à l’assemblée nationale. Il a rappelé son action dans la lutte contre les violences aux enfants et a annoncé la mise en place d’un repérage systématique à l’école sur la prévention des violences sexuelles, et d’un accompagnement psychologique. La prostitution des mineurs devrait également l’objet de "mesures pour mieux prendre en charge les victimes".

Mobilisation syndicale

Alors qu’il parlait, plus de 200 professionnels de la protection de l’enfance étaient rassemblés depuis le matin sur l’esplanade de la cité des congrès à l’appel de plusieurs syndicats. Afin que ces assises soient aussi "le lieu d’expression des difficultés et des dysfonctionnements du système", le communiqué intersyndical dénonce pêle-mêle "le fichage des jeunes migrants, les hébergements hôteliers, le sous-effectif des professionnels éducatifs, la non-application des mesures judiciaires, l’absence de moyens humaines et financiers". "Et le projet de loi ne change rien, regrette Sophie Herlin Martinez, de la CGT services publics, présente lors de ce rassemblement, il ne fixe aucun taux d’encadrement dans les structures de l’aide sociale à l’enfance, il n’interdit pas l’accueil à l’hôtel puisque des dérogations sont possibles, et il rend obligatoire le fichage des mineurs non accompagnées dans l’évaluation de la minorité".
Les revendications des professionnels du secteur se retrouvent également dans un "Appel pour un code de l’enfance", lancé le 13 juin par Jean-Pierre Rosenczveig, ancien président du Tribunal pour enfants de Bobigny, avec quatre anciennes défenseures des enfants, signé par plus de 700 personnes.

Mariette Kammerer