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■ ACTU -La lutte des compagnons d’Emmaüs fait boule de neige
Dans le Nord, le mouvement de révolte initié par les travailleurs sans-papiers d’ Emmaüs Saint-André au début de l’été prend de l’ampleur. Le 22 août dernier, des dizaines de compagnons de la communauté de Dunkerque se sont eux aussi déclarés en grève pour dénoncer leurs conditions de vie et de travail.
Les 21 grévistes d’Emmaüs Saint-André viennent de reconduire leurs 70ème jour de grève. Alors que l’enquête diligenté par le parquet de Lille pour traite des êtres humains et travail dissimulé est toujours en cours, le collectif attend qu’Emmaüs France condamne officiellement les pratiques de la direction de la Halte-Saint-Jean et soutienne leur demande de régularisation auprès de la préfecture du Nord. Si leurs revendications ne sont pas entendues, la CGT a d’ores et déjà prévenu que le rapport de force se durcira dès septembre au niveau national.
Les compagnons sans-papiers de Saint-André viennent de reconduire la grève pour le 70ème jour. ©Jérémie Rochas
Pierre Duponchel, président du conseil d’administration de la Halte-Saint-Jean continue de « s’inscrire en faux contre toutes les accusations injustement portées à l’encontre d’Anne Saingier », la responsable de la communauté dans le Nord Pas de Calais. Il a d’ailleurs refusé de respecter les décisions prises par Emmaüs France en juillet dernier qui demandait « la mise en retrait de la responsable et le lancement d’un audit externe ».
Extension de la rébellion
De son côté, la préfecture du Nord n’a toujours pas donné suite aux demandes de régularisation exceptionnelle des compagnons au titre du préjudice subi. « Qu’il pleuve ou qu’il neige, on restera sur le piquet et s’il le faut on ira chez Darmanin ! », prévient Ibrahima Yattarra, porte-parole du collectif de grévistes.
« Nous aussi nous voulons une vie digne. Nous devenons fous à rester ici », s’insurge Aboubacar, compagnon sans-papiers de la communauté Emmaüs de Dunkerque en grève depuis 17 jours avec une vingtaine de ses camarades de galère.
Certains compagnons e Emmaus Dunkerque travaillent depuis sept ans dans la communauté sans être régularisés. ©Jérémie Rochas
Contrairement à la communauté de Saint-André, celle de Grande-Synthe dispose pourtant de l’agrément OACAS censé garantir des droits aux compagnons, notamment une protection sociale, une déclaration de leur activité à l’Urssaf, et un accompagnement vers l’obtention d’un titre de séjour au terme de trois années de travail dans la communauté. Mais les travailleurs accusent la direction de la communauté d’avoir volontairement négliger leurs démarches de régularisation pour les exploiter.
Tentative de répression
« On travaille 40 heures par semaine pour un salaire de 350 euros par mois et on ne reçoit aucune reconnaissance de la part de la direction. Certains sont ici depuis sept ans », insiste Fode, porte-parole des grévistes. Ils dénoncent également des pratiques racistes et des menaces constantes d’expulsion. Ils demandent la démission de la directrice et la régularisation de l’ensemble des compagnons sans-papiers.
Dès les premiers jours de grève, la direction de Emmaüs Dunkerque aurait menacé certains grévistes de les expulser de la communauté. Quelques jours plus tard, elle obtenait de la justice une décision d’expulsion du piquet de grève avec le concours de la force publique. Une décision contestée par les avocats de la CGT. Le 21 septembre prochain, une audience au tribunal judiciaire de Dunkerque devra trancher sur le bien-fondé de cette requête.
Contactée, la direction d’Emmaüs Dunkerque n’a pas souhaité répondre à nos questions.
Jérémie Rochas
Pour rembobiner : ■ ACTU - Mouvement de grève à Emmaüs dans le Nord et dans Streetpress :Dans le Nord, une communauté Emmaüs accusée de traite d’êtres humains et de travail dissimulé
À lire aussi dans Lien Social n°1149 : Communautés : Les mondes d’Emmaüs