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► C’est quoi le problème ? Par Mélodie • Les premiers pas
Les premiers pas dans une institution, pour des parents d’enfants « cabossés », c’est une étape terrible ! Pourtant, quand on prend le temps d’ouvrir les yeux, les esgourdes, les bras grands-comme-ça et le cœur, n’en déplaise aux prôneurs de la distance (de la juste paraît-il, combien de centimètres sont conseillés ? Mystère !), ce sont eux, les parents, qui tendent la perche pour nous guider vers ce qui est bon pour eux. Évidemment, faut pas être aveugle, sourd, manchot ou gelé de l’intérieur, voire les quatre à la fois.
Quand l’Accueil devient le violon d’Ingres, la marotte ou le challenge du travailleur social, la famille et l’enfant peuvent (re-)prendre leur respiration sur ce socle, propice à la rencontre, avant d’amorcer le long chemin de combattant(s) qui les attend.
Non, ce n’est pas une perte de temps ! C’est même exactement le contraire.
En plus, il y a « ce petit quelque chose » de réjouissant qui circule entre eux : cette confiance qui hésite, qui ne sait pas trop comment elle va trouver sa place ; c’est tellement fragile la confiance, elle peut vite s’égarer ! Alors, même si le temps n’est pas élastique, il détient une compétence rare, celle de paraître infini à ceux qui aiment le prendre. Et c’est loin d’être inutile d’offrir un café ou un thé et quelques sucreries à de nouveaux parents qui, dès les premiers instants, racontent (souvent pour la énième fois) le drame qui s’est abattu sans préambule dans leur maison !
Y’a le temps, le regard et l’écoute pour fonder cet incontournable socle. Pas de magie, non, un vrai travail d’horloger qui repère l’infime grain susceptible d’enrayer le mouvement. Eh oui, la mécanique relationnelle est fragile et jamais à l’abri d’autres coups durs (opérations, attelles, corset, coma), qui ébranleront la famille et se grefferont inévitablement sur les premières douleurs ; comme si le handicap ne se suffisait pas à lui-même.
Il devrait être aisé de comprendre que l’agressivité adressée aux professionnels, souvent reprochée aux parents, n’est pas dirigée contre eux, mais pointe ce « putain » de handicap qui stigmatise à jamais le corps de l’enfant rêvé. On est payés (sans doute mal, mais c’est un job qu’on a choisi) et la moindre des choses est de contenir cette « soi-disant violence » pour qu’ils puissent continuer à faire face, sans y perdre toutes leurs plumes.
Voguer sur le versant de l’attachement est un choix « in-quantifiable » (mesure impossible à ranger dans un tableau, pour évaluer le temps nécessaire pour accorder nos violons et jouer le morceau ensemble), mais ô combien salutaire !