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► LE BILLET de Vince : Monique

Je la kiffe Monique (1). Voilà plus de 30 ans qu’elle s’évertue à porter un regard positif sur les familles qu’elle accompagne. Monique, c’est une éduc du service d’action éducative en milieu ouvert (AEMO) dont je suis responsable.
Elle a tout compris Monique. Lorsque j’ouvre une mesure avec elle, même moi j’ai les yeux qui brillent. Elle ne vend pas du rêve aux familles, non non. Simplement, elle rend les choses possibles.
Les parents désignés comme défaillants poussent souvent nos portes avec ce regard résigné ou dégradé sur eux-mêmes. Ils viennent déjà de passer à la moulinette du jugement (au sens propre) lors de l’audience chez le Juge des Enfants qui leur a bien renvoyé leur incompétence. Les objectifs de la mesure sont écrits, noir sur blanc. La problématique, on la connaît. Elle est nommée, encrée, référencée, tamponnée. À quoi bon leur enfoncer la tête dans leurs difficultés ?
Monique elle prend le contre-pied du stigmate. Elle sait qu’en considérant d’abord les compétences et les ressources de ces « mauvais parents » elle leur permet d’être déjà en mouvement, avant même de les accompagner dans la mesure éducative.
À l’ouverture de la mesure, ces parents-là ne pensaient pas qu’on les interrogerait d’emblée sur leurs valeurs, leurs savoirs-être, leurs savoirs-faire, leurs désirs, leurs projets, leurs idéaux. Ils pensaient venir, honteux ou en colère, se justifier une fois de plus sur la désignation de leur altérité.
Monique, elle les surprend. Elle les considère. Elle gratte immédiatement l’étiquette qui les démange et avec laquelle ils se présentent sous contrainte. Elle arrive à les faire sourire ou à les émouvoir en parlant d’enfance en danger !
Pour autant elle n’est pas dans le déni du symptôme. Elle a un regard juste et adapté sur les « pannes » de l’exercice parental. Mais avant de pouvoir travailler sur certains freins, il faut bien considérer toute la mécanique, tout ce sur quoi on peut s’appuyer pour restaurer, réparer, dépanner.
Accueillir ces gens dans leur singularité et leur intégrité, c’est sans doute respecter leurs propres capacités de résilience.
Le travail social classique a trop longtemps été marqué par une politique curative et un rapport dominé/dominant entre la personne dite « défaillante » et le travailleur social dit « sachant ». Monique elle dit toujours aux familles qu’elle est très fainéante et qu’elle compte bien s’appuyer sur elles pour les aider à identifier leurs propres capacités de transformation.
Ce regard bienveillant inconditionnel, c’est sans doute ce qui devrait animer chaque travailleur social. Facile à dire, parfois beaucoup moins à mettre en œuvre. Monique, elle sait faire.
Bref, vraiment je la kiffe Monique.


(1) Le prénom n’a pas été changé parce que Monique c’est Monique et que je suis fier de travailler avec elle.