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■ ACTU - Loi Prostitution • Courant alternatif
Jugeant que le bilan d’étape de la loi Prostitution de 2016 ne rend pas compte de son impact sur les personnes concernées, le 7 juillet, les associations de santé communautaires ont présenté un rapport alternatif.
« Le bilan de la loi prostitution rendu public le 23 juin (1) brille par l’absence totale de parole des personnes concernées », pointent les associations de santé communautaires qui accompagnent les travailleurs et les travailleuses du sexe.
Contrairement aux associations abolitionnistes qui l’ont jugé positif, elles lui reprochent de recommander seulement plus de portage politique et de fonds pour l’application de la loi. En réaction, elles ont publié leur propre rapport (2). Et il est sévère.
June Charlot, médiateur santé de l’association Griselidis à Toulouse, Eva Vocz, porte-parole de la Fédération Parapluie Rouge, Cybèle Lespérance, secrétaire générale du syndicat du travail sexuel (Strass), Giovanna Rincon, directrice de l’association Acceptess-T et Nadja del’Oro, animatrice de prévention à l’association Cabiria à Lyon, le 7 juillet lors de la présentation du rapport sur Webinar.
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Selon ce rapport, rien ne permet d’affirmer que la loi protège les victimes de la traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle. Celle-ci est multifactorielle, notamment intrinsèquement liée au contexte de la migration.
Alexandra, Ella, Grace et Faith, quatre personnes nigérianes victimes de la traite accompagnées par l’association Paloma, témoignent.
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Parcours de sortie, parcours du combattant
L’accompagnement du parcours de sortie de prostitution – en grande partie assuré par des associations abolitionnistes - éloigne les travailleurs du sexe du droit commun avec une allocation de 330 euros par mois, quand le seuil de pauvreté est fixé à 1 026 euros. « Les personnes doivent cesser immédiatement toute activité prostitutionnelle et sont surveillées par la commission départementale prête à tout moment à retirer les droits », pointe l’association lyonnaise Cabiria. Obtenir les autorisations de séjour de deux ans, réévaluées tous les six mois, entraine une instabilité administrative qui rend compliqués l’accès au logement, l’inscription à Pôle emploi ou la formation. » De plus, toutes les personnes qui le désirent ne peuvent pas intégrer ce dispositif, les critères variant selon les territoires sur décision du préfet, (maitrise du français, interdiction de quitter la France, exigence d’un certificat de naissance impossible à obtenir dans certains pays).
Risques sanitaires accentués
La loi qui se veut préventive, détériore en réalité la santé des personnes prostituées, moins en mesure d’imposer le port du préservatif et dont l’isolement complique l’accès à la prévention des risques. Elle accélère la rupture des parcours de soins en accentuant leur mobilité, rendant difficile le suivi social et médical. « Nombre de celles qui prennent un traitement contre le VIH ou la PrEP les arrêtent et ne les reprennent que lorsqu’elles viennent à Paris. Entretemps, leur état de santé s’aggrave », alerte Giovanna Rincon, directrice de l’association Acceptess-T qui accompagne les femmes transgenres. De plus, les associations dénoncent l’augmentation des violences envers les travailleurs du sexe.
Prostitution des mineurs
Enfin, le bilan officiel s’inquiète de la hausse du nombre de mineurs qui se prostituent qui constitueraient 25 % à 30 % de la file active des associations spécialisées. Sans contester l’augmentation de cette prostitution, June Charlot, médiateur de santé à l’association toulousaine Grisélidis, juge ces chiffres amplifiés. « L’association Itinéraires-Entracte qui mène des actions avec les mineurs prostitués à Lille en compte 7 % dans sa file active », illustre-il. Il juge ce bilan effectué « sans méthodologie scientifique » et appelle à une étude sérieuse pour recueillir des données complètes.
En conclusion, ce rapport demande notamment de favoriser l’approche communautaire au sein d’associations travaillant avec les personnes prostituées, de mettre en place une démarche interministérielle de l’action publique en leur direction, de réformer le cadre, de décriminaliser le travail du sexe, d’abroger la pénalisation du client, le volet sur le proxénétisme et d’appliquer les lois contre le travail forcé, l’esclavage, la traite des êtres humains « suffisantes pour protéger les travailleuses du sexe de l’exploitation ». Et avant tout de prendre en compte leur parole.
(1) Ce bilan de la loi du 13 avril 2016 qui vise à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées, a été dressé par les inspections générales des affaires sociales (IGAS), de l’administration (IGA) et de la justice (IGJ). Cette loi a inscrit dans le droit la position abolitionniste de le France et appelle à une réponse adaptée des pouvoirs publics. À lire sur https://bit.ly/2BQgUO4
(2) « Travail du sexe : réponses à l’évaluation de la loi de 2016. À lire sur https://www.medecinsdumonde.org/fr/actualites/publications/2020/07/06/travail-du-sexe-reponses-levaluation-de-la-loi-de-2016
Retrouvez la présentation du rapport alternatif :