N° 1220 | Le 11 janvier 2018 | Critiques de livres (accès libre)
Au chevet du diable
Retrouver la part d’humanité chez les auteurs de violences sexuelles : vaste chantier auquel travaillent, avec courage et ténacité, depuis quelques années, le docteur Reveillaud et son équipe. Pour y arriver, il leur a fallu tout d’abord dépasser le mépris et le rejet qui entourent ces agresseurs et les considérer comme des patients dignes d’être accompagnés.
Leur second souci a consisté à se montrer vigilants face au risque tant de banalisation ou de minimisation des comportements délictueux, que de déni partiel ou total de la souffrance infligée. Plusieurs ambitions sont recherchées. Sortir de l’isolement qui annihile toute pensée. Permettre aux auteurs de comprendre cette partie d’eux-mêmes qui leur a échappé, en faisant émerger d’éventuels épisodes douloureux de leur enfance. Favoriser leur accès à une élaboration psychique dépassant la honte pour accéder à une acceptation authentique de la culpabilité. Encourager la parole pour échapper au cloisonnement mental rendant impossible la reconnaissance de l’autre réduit au statut d’objet. Faire sortir du repli défensif qui charge la victime de la responsabilité de l’agression.
Le travail engagé, qui ne leur donne aucun avantage dans le traitement judiciaire, propose aux patients d’intégrer un groupe thérapeutique. L’appareil psychique groupal offre une scène sur laquelle le sujet, qui a subi une effraction de sa propre enveloppe mentale, projette le contenu de son inconscient. La dynamique interactive produisant un processus « meta-défensif » tempérant les angoisses archaïques, elle sert de support à l’expression des affects et des représentations qui, tout en favorisant le cheminement et la prise de conscience, permet de prévenir la réitération.
Jacques Trémintin
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