N° 1227 | Le 17 avril 2018 | Critiques de livres (accès libre)
L’un des cinq objectifs de la « stratégie pour une croissance intelligente, verte et inclusive » conçue par la Communauté européenne fixait pour ambition aux États membres la diminution de vingt millions le nombre de pauvres, à l’horizon 2020. On en est loin.
Dans notre pays, en 2013, 8,6 millions de personnes vivaient avec 1 000 €, 5 millions avec 830 € et 2 millions avec 666 €. Rien n’est vraiment mis en œuvre. Pire, on cantonne trop souvent les pauvres à leurs problèmes, sans chercher à écouter ce qu’ils ont à dire sur le fonctionnement de la société et les solutions à apporter. Or, ils ont une pensée et une intelligence trempées dans l’expérience quotidienne de l’exclusion subie, des compétences, des savoirs et des ressources éprouvés au feu des épreuves vécues. ATD Quart Monde travaille à faire émerger cette parole de sans voix. « On n’attend rien d’eux, parce qu’on n’entend rien d’eux », reprend Bertrand Varfaillie qui se fait fort d’illustrer les initiatives, les audaces et les expérimentations se déroulant au quatre coins de la France : épicerie sociale, bagagerie main libre pour les sdf, week-ends proposés aux enfants placés et leur famille, festivals des arts, stages de formation aux nouvelles technologies numériques, université populaire du quart monde croisant des savoirs d’études et des savoirs d’usage expérientiels.
Faire un pas de côté par rapport à l’urgence matérielle, ce n’est pas se détourner des embarras de la vie quotidienne, c’est juste une autre manière de les affronter. Les secours matériels ne sont pas suffisants pour réparer les outrages de la pauvreté, redorer son estime de soi et reprendre pied dans la société. Il faut aussi des espaces de parole, du débat, de la pensée, des moyens d’expression artistique, des activités culturelles.
Jacques Trémintin
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