N° 1162 | Le 30 avril 2015 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)
Adolescents difficiles : penser et construire des partenariats
Eliane Bouyssière-Catusse et Jean-Philippe Raynaud
Même s’il n’existe pas de nosographie décrivant le syndrome de « l’adolescent difficile » ou du « jeune en grande difficulté », on peut aisément repérer ce qui caractérise cette population. Elle fonctionne dans l’immédiateté et l’égocentrisme, manifestant une très faible tolérance à la frustration. Elle privilégie l’agir sur la pensée, se focalisant avant tout sur le présent. Elle éprouve sa valeur à l’aune du passage à l’acte, recherchant surtout la satisfaction de ses besoins primaires. Ce mode de fonctionnement est largement influencé par la poussée hormonale qui, à cet âge, inonde le cerveau, incitant à la prise de risque et à la recherche d’intenses émotions. Mais il est aggravé par l’évolution d’une société où ont disparu les discours qui, jusque-là, offraient une cartographie des chemins praticables.
Depuis l’Antiquité jusqu’aux années 1950, l’autorité dominait et encadrait la liberté. Depuis, l’affranchissement d’un certain nombre de limites a fait reculer la puissance de l’interdit et l’individu est devenu légitime à poser ses propres normes. L’adolescent compense l’insécurité intérieure induite par un comportement actif lui donnant le sentiment d’être l’acteur de sa vie. On est passé d’une pathologie des conflits suscitée par une société répressive, à une pathologie du lien favorisée par une société libérale.
Soutenir ces ados difficiles, c’est les aider à élaborer, à gérer leurs insatisfactions, à différer leurs réponses, à supporter leurs tensions internes et à accepter des renoncements, dans toutes les dimensions de leur existence. Mais c’est aussi et tout autant assurer la cohérence des adultes les entourant qui doivent pouvoir leur proposer une vision globale et concertée de leur parcours, ainsi qu’une analyse partagée des échecs sans que ne soient stigmatisés ceux qui s’y sont heurtés.
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