N° 842 | Le 31 mai 2007 | Philippe Gaberan | Critiques de livres (accès libre)

Dans le dédale des thérapies familiales

Muriel Meynckens-Fourez & Marie-Cécile Henriquet-Duhamel


éd. érès, 2006 (220 p., 23 €) | Commander ce livre

Thème : Thérapies familiales

La systémie n’existe pas… sauf dans les représentations de ceux qui veulent dénier toute crédibilité et toute efficacité thérapeutique à cette approche complexe de l’individu souffrant. Dès lors, au singulier de « systémie » il faut préférer le pluriel des « approches systémiques », quitte à prendre le risque d’entrer dans ce que les auteurs appellent « le dédale des thérapies familiales ».

Mais la mythologie grecque n’est-elle pas là pour rappeler à quiconque désire tenter l’aventure du comprendre qu’il est possible de s’y retrouver à condition de disposer d’un fil conducteur ? Aussi, ce « manuel systémique » constitue-t-il bel et bien un ouvrage de référence ! Sa première utilité est topologique puisque les deux auteurs ont l’intelligence de montrer comment la thérapie systémique ne naît pas dans la tête d’un seul père fondateur et à un seul endroit de la planète mais au contraire comment dans le tout début des années 70, elle se nourrit des recherches et des travaux de chefs de clinique et de leurs équipes en de multiples villes et pays.

C’est ainsi que l’idée de thérapie familiale jaillit simultanément à New York, à San Francisco (Palo Alto), à Milan, à Rome, à Washington et ailleurs. Il n’est pas anodin qu’un même principe thérapeutique jaillisse ainsi en des endroits divers sous la houlette de personnalités différentes apportant chacune sa touche particulière à une approche similaire. Puisqu’en effet, le principe fondateur de la démarche systémique est de sortir l’individu souffrant de sa situation de solitude coupable pour le replacer dans le réseau complexe de relations que constitue tout système vivant.

Dès lors, l’intérêt de ce manuel vient de ce qu’il dégage clairement la question « nodale du pouvoir » dans la relation thérapeutique : qui, dans le réseau interactionnel incluant la personne souffrante et son environnement, détient les clefs d’un changement possible ? Une question qui traverse tout l’ouvrage et le déborde finalement tant elle ne concerne pas seulement les thérapies systémiques mais toute relation d’aide éducative et de soin. Par ailleurs, cette question du pouvoir pose de manière conséquente celle de la place de chacun dans un processus de soin.

Et la lecture d’un tel ouvrage donne forcément l’envie de critiquer la vision simpliste et pourtant unanimement défendue dans les discours dominants selon laquelle le bénéficiaire du soin doit être au centre du dispositif. Avec l’approche systémique cette notion de centre n’a plus de sens… De quoi donner à réfléchir !


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