N° 1138 | Le 3 avril 2014 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)
Éduquer un enfant implique de suivre un cheminement d’humilité sans égal : c’est apprendre sur le tas par un jeu d’essais et d’erreurs ; c’est accepter de se sentir décentré, interrogé, déplacé ; c’est être interpellé en permanence sur ce que l’on sait ou ce que l’on croit savoir. Telle est la conviction d’un auteur qui, tout en tenant compte des mutations en cours, rappelle néanmoins un certain nombre d’invariants.
Certes, explique Myriam Tonus, un monde s’est effondré : celui d’une société stable, à l’apparence immuable, se reproduisant de génération en génération et composée d’individus s’insérant dans un ensemble social dont ils adoptaient les règles. Les places, les rôles et les hiérarchies se sont trouvés bousculés : par la survalorisation des liens affectifs, par la montée en puissance du droit individuel qui surpasse tout, mais aussi par l’incertitude d’un avenir qui fait douter aux parents de l’amélioration du sort de leurs enfants.
Pour autant, si les modalités éducatives ont inévitablement été bousculées, ce qui est fondamentalement en jeu reste du même registre qu’auparavant. Au principe de plaisir qui enferme l’enfant dans la satisfaction immédiate, il faut comme avant opposer la subtilité du désir différé et de l’attente. À la tyrannie d’une toute puissance fantasmée lui faisant croire que tout est possible, du moment qu’il le veut, il faut comme avant lui faire vivre les limites et les frustrations. À la tentation d’un narcissisme le conditionnant à ramener tout à lui, il faut comme avant substituer l’heureuse cohabitation avec autrui.
Par contre, ce qui a changé, c’est cette assimilation de l’éducation à la confrontation permanente à des règles et des devoirs sans fin et l’émergence de l’accompagnement dans une quête et une initiation lui permettant de trouver sa propre voie pour s’élever au-dessus des obstacles qui bornent sa vue et son cheminement.
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