N° 1127 | Le 21 novembre 2013 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)
Guide international sur la méthodologie du travail de rue
Edwin de Boevé & Maita Giraldi
Cet ouvrage collectif a été conçu par un réseau international de travailleurs sociaux de rue issus d’une quarantaine de pays, tant du Sud que du Nord. Ils ont souhaité rendre compte de cette culture commune qui transcende la grande diversité de leurs modalités d’action, tout en restant fidèle aux singularités et aux particularités locales. Tous les témoignages et les expériences présentés ici, qu’ils soient exposés simplement ou théorisés n’ont pas vocation à constituer une méthode unique, mais à illustrer la richesse des savoir faire accumulés.
Ces professionnels travaillent dans des espaces peuplés ou désertés, violents ou pacifiques, pauvres ou opulents. Ils s’adressent à des jeunes ou des adultes. Ils mettent l’accent tantôt sur des besoins basiques, tantôt sur la dimension relationnelle. Mais, quel que soit le contexte dans lequel ils interviennent, ils recherchent tous les mêmes objectifs : développer l’estime de soi et les compétences personnelles, afin de favoriser pour chaque être humain tant la reprise du pouvoir d’agir sur son propre scénario de vie que la participation à la vie sociale. Quelle que soit la contrée, ils fonctionnent sur les mêmes registres : le respect et la tolérance, l’écoute et l’empathie, l’adhésion et la coopération. Qu’ils privilégient la prévention générale, l’éducation non formelle ou la réduction des risques, leur quête est identique : trouver cette remédiation qui permettra d’améliorer le bien-être social.
Les professionnels de la rue sont souvent les premiers et les derniers maillons chargés d’atteindre l’inatteignable, quand tous les autres ont failli ou se sont montrés inefficients. Ils vont à la rencontre des « invisibles » (ou trop visibles ?), l’offre relationnelle précédant la demande. Ils tissent un lien fondé sur la confiance. Ils proposent leur présence sur la durée et dans la continuité. S’ils prennent le temps de repérer les lieux et d’investir les territoires, c’est progressivement qu’ils trouvent leur place, s’attachant à faire partie du décor, à s’impliquer dans la quotidienneté et à s’appuyer sur les réseaux de solidarité pré existants. Leur crédibilité tient à leur capacité d’adaptation, à la souplesse de leur intervention et à leur efficacité dans la médiation avec l’environnement.
Ce long processus ne donne pas de résultats immédiats uniques et univoques. Il s’oppose à une instrumentalisation par des financeurs qui attendent surtout une normalisation des marginaux. Leur ambition n’est pas de les sortir de la rue, ni de lutter contre la déviance sociale, mais de rétablir la primauté de l’être humain et de prendre en compte la fonction supplétive de socialisation qui se joue dans cet espace.
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