N° 1190 | Le 1er septembre 2016 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)
Depuis trente ans, ils ne cessent d’occuper le terrain, avec une rhétorique passée maîtresse dans l’outrance et le déclinisme. Ils vocifèrent contre les pédagogues accusés d’être au choix des Khmers rouges, des ayatollahs ou des Attila ; ils menacent de décadence et d’effondrement notre civilisation si l’on touche à une seule règle d’orthographe ; ils dénoncent la faillite, la dérive, la débâcle ou la détresse d’une école mise en accusation pour son laxisme, son égalitarisme ainsi que sa volonté de niveler par le bas et de supprimer tout parcours d’excellence.
Leurs remèdes ? Restaurer l’ordre moral, l’identité nationale et les hiérarchies sociales, réapprendre aux élèves l’amour de la patrie et la Marseillaise, rétablir le port de l’uniforme et l’autorité du maître, la discipline et l’effort. Ce sont les néo-conservateurs que l’auteur appelle les réac-publicains. Incapables d’orthographier, d’écrire, de lire et même de parler, les élèves seraient les nouveaux barbares de notre époque, élevés dans la haine de la culture et du savoir induit par le culte de l’égalitarisme.
En réalité, ce n’est pas l’abaissement du niveau ou l’abandon des exigences qui expliquent la crise de notre école, mais bien son incapacité à en finir avec l’élitisme et la compétition permanente qui renforcent inexorablement les inégalités. Mais, l’élite sociale mobilise toutes ses forces pour préserver ses privilèges de classe, repoussant sans cesse les limites de l’invective face à la moindre remise en cause des conservatismes en place. Jamais elle ne tolèrera que cette école offre d’égales possibilités de développement à chacun, ouvre à tous l’accès à la culture et élève en continu le niveau de l’ensemble de la population. Seul compte le mérite qui condamne 43,8 % des enfants d’ouvriers à se retrouver en SEGPA contre 2 % d’enfants de cadre supérieur.
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