N° 1322 | Le 6 septembre 2022 | Critiques de livres (accès libre)
De bonnes intentions face à l’impasse
S’il est un plan d’action ambitieux dont les objectifs et échéances sont loin d’être tenus, c’est bien celui de l’école inclusive. Mais comment cela pourrait-il en être autrement, quand sa mise en œuvre improvisée et sans réelle concertation avec les équipes pédagogiques les contraint à une forme intuitive de bricolage aménagé le plus souvent dans une totale improvisation ? Le système scolaire français est passé du modèle ségrégatif de filière au modèle intégratif de parcours, sans préparation, sans financement suffisant et sans formation. La qualification dédiée aux enseignants coordinateurs comportait 750 heures. Elle s’est réduite à 400 heures en 2004 et à 300 heures en 2017 ! Ils sont ensuite sensés devenir personne ressource pour leurs collègues, aptes à leur donner des réponses et des conseils. Ce qui les exonèrerait de toute adaptation professionnelle spécifique. Et quand ils peuvent finalement y prétendre, cela ne se fait pas, par manque de remplaçants. Ne pas savoir comment réagir face à des élèves hurlant, pleurant, courant dans tous les sens, s’enfuyant, bousculant, frappant, mordant les adultes comme les autres élèves… est source de grande souffrance tant pour les enseignants, que pour les enfants et leurs familles. Mais, au-delà de la réponse technocratique, dogmatique et utilitariste, l’inclusion se confronte à un problème de fond. Les programmes scolaires s’adressent à un idéal type d’élève bien éloigné de ceux à besoins particuliers. Alors qu’il faudrait une transformation des modes de pensée et des méthodes pour répondre aux besoins spécifiques, l’idéologie méritocratique au cœur de l’école républicaine privilégie les compétences académiques dispensées sur un modèle pédagogique simultané, par des enseignants formés d’une manière uniforme à une didactique disciplinaire indifférenciée.
Jacques Trémintin
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