N° 606 | Le 24 janvier 2002 | Patrick Méheust | Critiques de livres (accès libre)
C’est en 1945, à la libération et alors que les aspirations à une vie sociale et économique démocratique peuvent enfin s’exprimer que se développe le « tiers secteur ». Les mutuelles prennent un certain essor aux côtés de la Sécurité sociale, pour couvrir la partie des frais de santé qui restent à la charge de l’usager (le fameux ticket modérateur). Le mouvement coopératif, pour sa part, se développe dans le domaine agricole, encouragé par le ministère de l’Agriculture. Il s’agit de créer des conditions plus efficaces de production en mutualisant les moyens et en favorisant la vulgarisation des nouvelles techniques. L’État s’appuie également sur les banques coopératives ou mutuelles (Crédit agricole, Banques populaires, Crédit mutuel, etc.) pour promouvoir l’accès au crédit et encourager l’épargne.
Enfin, le secteur associatif largement soutenu lui aussi par les politiques publiques se développe dans de multiples directions. Les associations prennent en charge le soutien aux oubliés de la croissance et apportent des secours aux publics en difficultés : familles déshéritées, personnes âgées, enfants et adultes handicapés ? Mais les associations se tournent aussi vers la démocratisation de l’accès au sport, à la culture et aux vacances.
L’ensemble des structures de l’économie sociale et solidaire, quel que soit leur statut juridique, ont en commun un refus du « tout monétaire » et privilégient, au contraire, une approche collective des problèmes, fondée sur un esprit de solidarité et la mutualisation des ressources. Cependant, il faut bien avouer que la dimension économique de leur activité a aujourd’hui pris une ampleur impressionnante. Aussi, convient-il de réussir des combinaisons difficiles, des articulations parfois acrobatiques, entre les logiques financières, sociales ou culturelles qui se doivent de trouver un terrain de pacifique cohabitation. L’environnement doit aussi être pris en compte dans une approche pragmatique du quotidien. Il faut sans doute aujourd’hui tenter de réformer les systèmes oppressifs de l’intérieur plutôt que de s’aventurer dans une confrontation brutale qui a toutes les chances de s’avérer stérile. Le compromis devient à ce niveau la planche de salut car l’enjeu ultime est bien de gérer les tensions qui peuvent naître lorsqu’il est question de décliner concrètement les grandes idées et les stratégies contenues dans les projets « politiques ».
Aussi, de ce point de vue, le bien commun à partager au sein des organismes de l’économie sociale et solidaire consiste certainement, pour les acteurs impliqués, dans une forme de volonté inébranlable d’aboutir en dépit des divergences. Mais, pour ce faire, il faut également être convaincu des vertus du débat démocratique ?
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