N° 639 | Le 24 octobre 2002 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)
Dans la veine de son premier ouvrage « La petite graine et le jardinier » consacré à l’éducation, voilà la suite des mémoires d’un directeur en retraite qui jette sur notre contexte professionnel un regard sans concession. S’il prend la défense de l’acteur de terrain, il n’est pas tendre avec les partenaires institutionnels. Une partie de l’opinion publique pense que les éducateurs spécialisés ont la belle vie (imaginez-vous : se promener tout le temps avec des enfants). L’auteur s’inscrit ici en faux : gestion d’une violence qui peut exploser à tout moment, présence à assurer 24 heures sur 24, exigence paradoxale de réintégrer des jeunes délinquants tout en préservant la société de leurs méfaits
ce métier mérite à être mieux connu et bien plus valorisé. Du côté des partenaires, il y a d’abord les juges des enfants qui présentent tous les profils depuis ceux qui sont complètement dépassés (se faisant copieusement insulter tant par les jeunes que par leurs parents, sans réagir) jusqu’à ceux imbus de leur fonction (pour qui l’éducateur n’est là que pour exécuter leurs ordres). D’où les stratégies à mettre en ?uvre pour s’adapter à ces disparités. Du côté du conseil général, ce qui l’emporte trop souvent, c’est la lourdeur administrative : mieux vaut une mesure classique qu’un montage adapté ne rentrant pas tout à fait dans le cadre juridique, même si le résultat éducatif est sans commune mesure tout comme l’économie réalisée qui, au final, peut se compter en millions d’euros. Que de gaspillage du fait de responsables qui refusent de s’engager !
Jacques Desbois continue son inventaire à la Prévert, écornant au passage, ici, l’éducation nationale et son incapacité à accueillir les jeunes les plus en difficulté, là, un procureur considérant les abus sexuels comme le cadet de ses soucis, les dérives de la PJJ perdue dans ses procédures et enjeux de pouvoir, ici, l’autoritarisme et la rigidité dans les directions des grandes associations, là. De quoi, en quelque sorte permettre à chacun de s’y retrouver : la retraite libère une parole trop souvent bridée par le devoir de réserve.
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