N° 1005 | Le 10 février 2011 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)
Voilà un ouvrage passionnant qui éclaire l’histoire de ces 430 maisons familiales rurales (MFR) qui scolarisent 51 000 élèves, sur les 12 millions que compte notre système scolaire. Inspirée du mouvement du Sillon initié par Marc Sangnier au début du XXesiècle et encouragée par le secrétariat central d’initiative rurale, la première tentative de création d’une formation gérée par des familles est le fait de trois couples d’agriculteurs et de leurs quatre garçons.
Une telle expérimentation va prendre une ampleur insoupçonnée, puisque la première maison, créée le 17 novembre 1937, se duplique en 67 exemplaires en 1945, 300 en 1960 et près de 500 en 1975. Le mouvement essaimera à travers trois continents et vingt-deux pays. Ce qui fait le succès d’une telle formule ? D’abord, une gestion par les parents ; ensuite, une alternance entre le monde du travail et dix semaines de regroupement éparpillées sur l’année scolaire ; une formation qui allie les connaissances scolaires à l’éducation à la vie et à la citoyenneté (les moments de repas, de loisirs, d’entretien de la maison sont partie intégrante de l’éducation apportée) ; enfin, une pédagogie adaptée à toutes les formes d’intelligence ne privilégiant pas la seule aptitude à l’abstraction.
Les MFR ont toujours été soucieuses de leur indépendance tant à l’égard de l’Église catholique (l’assemblée générale de 1945 supprimera le poste d’aumônier national), que d’un État qui, pour rester garant des programmes enseignés, n’a rien à faire dans la gestion des établissements. Le statut de loi 1901 et d’association familiale a été choisi en 1942 pour éviter la menace d’affiliation corporative imposée par la législation de Vichy. Les tenants de l’école unique et laïque pourront grincer des dents, mais les MFR proposent, depuis plus de 70 ans, une chance pour des milliers d’élèves rejetés par le système scolaire.
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