N° 912 | Le 15 janvier 2009 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)

La régulation des pauvres : du RMI au RSA

Serge Paugam & Nicolas Duvoux


éd. Puf, 2008 (114 p. ; 10 €) | Commander ce livre

Thème : Insertion

Remplacé par le RSA, le RMI n’est pas encore tout à fait mort. Est-il néanmoins possible de jeter une regard distancié sur ce que nous sommes en train de vivre ? C’est ce que nous proposent les deux auteurs, sociologues et observateurs avisés de l’action sociale. Première mise au point : la pauvreté est une notion floue, profondément ambiguë et contestable qui dépend étroitement d’un contexte géographique (le Français pauvre est riche en comparaison de certains pays du sud), historique (jusque dans les années 1970, ce sont les couples âgés qui focalisaient les situations de dénuement) et multifactoriel (les problèmes ne se rencontrent pas qu’au niveau financier, mais aussi en matière de logement, de santé, de relations sociales, de reconnaissance…).

Pour autant, deux explications traditionnelles se sont toujours opposées face aux pauvres. Soit, ils apparaissent comme les victimes d’une société injuste, n’ayant bénéficié ni du capital économique ni du capital culturel leur permettant de trouver la place qui leur revient. Soit, ils sont considérés comme paresseux et de mauvaise volonté, ne faisant pas suffisamment d’efforts pour s’en sortir. Il s’agit donc de les moraliser, de les contrôler pour éviter les fraudes et en tout cas de les contraindre à se remettre au travail.

Pour les auteurs, le RMI s’est inscrit initialement dans la première démarche : à la fois comme un droit et comme une aide provisoire dans un parcours d’insertion. Au cours du temps, il s’est avéré comme une solution durable pour une partie des allocataires fortement éloignés de l’emploi. De 350 000 prévus initialement leur nombre est monté à un million, dès le milieu des années 1990. Certains d’entre eux présentent des difficultés qui dépassent la simple recherche d’emploi. D’autres auraient besoin d’une formation préalable.

D’autres, enfin, peuvent reprendre le travail, mais ne le font pas dès lors qu’ils perdent de l’argent. Le RMI est surtout devenu stigmatisant et synonyme d’inemployabilité. Le RMA (revenu minimum d’activité) et le RSA prennent le contre-pied de cette victimisation et répondent à la prétention de responsabiliser les plus démunis. Ils transforment les allocataires en variables d’ajustement d’une économie qui mise avant tout sur la flexibilité. S’il s’agit, certes, d’encourager leur remise au travail, c’est dans les segments les plus dégradés du marché de l’emploi, avec un statut de travailleur précaire assisté.

Les auteurs plaident pour un changement de perspective : « Responsabiliser les pauvres ne doit pas conduire à déresponsabiliser la société dans son combat contre la pauvreté ». Et le problème majeur des allocataires des minima sociaux n’est pas de refuser de travailler, mais de pouvoir bénéficier d’autre chose que des emplois pénibles, peu valorisants, à temps partiel et peu rémunérés.


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