N° 803 | Le 29 juin 2006 | Patricia Delage | Critiques de livres (accès libre)

Le projet individuel - Repères pour une pratique avec les personnes gravement handicapées mentales

Philippe Chavaroche


éd. érès, 2006 (136 p. ; 10 €) | Commander ce livre

Thème : Usager

« Il a son projet individuel ! Entendons-nous très fréquemment prononcer de manière péremptoire par les professionnels au sujet de tel ou tel résident. Il semble toutefois que cette formule recouvre bien souvent une sorte d’incantation magique qui résiste rarement à l’épreuve d’un questionnement plus poussé et surtout, qui fait le plus souvent l’impasse sur la clinique singulière de ce sujet-là ». Philippe Chavaroche, formateur au centre de formation de la Fondation John Bost en Dordogne, propose une réflexion soutenue sur la notion de projet et sa pratique auprès de personnes handicapées mentales.

Construit de manière logique et linéaire, son ouvrage débute par une évocation historique et une définition du projet. Il développe par la suite des chapitres d’un intérêt certain sur la relation entre handicap mental lourd et projet individuel. « Il convient de s’en saisir comme un outil présentant un intérêt certain mais aussi […] de soumettre celui-ci à une rigoureuse analyse critique et de garder une juste distance, ni dans le dénigrement systématique ni dans la dévotion béate ». Ainsi, le projet doit s’inscrire dans la réalité, dans une certaine dimension rationnelle, technique, avec des indicateurs objectivables. C’est dans la mise en tension entre une dimension d’avenir et une dimension de réalité que se construit un projet individuel, en prenant garde de ne pas vouloir assujettir l’usager à son projet parce qu’il doit suivre ce qui a été pensé pour lui.

C’est ainsi que l’auteur décrit les stéréotypes du projet individuel : le maintien des acquis, le bien-être, le plaisir, le trop ou le pas assez en passant par les potentialités. Une mention spéciale pour le chapitre intitulé : « Besoins et désirs chez les personnes lourdement handicapées », qui apporte un éclairage concret, étayé théoriquement et particulièrement intéressant dans la prise de recul et la réflexion qu’il amène à effectuer et donne tout son sens à ce livre. La notion de projet est ici, tout au long de l’ouvrage, décortiquée pour l’éloigner d’une sorte de « fétichisme » comme en parlait déjà François Tosquelles, et la ramener à la question du sens de l’intervention. Une sage réflexion donc.


Dans le même numéro