N° 1164 | Le 28 mai 2015 | Jacques Trémintin | Critiques de livres (accès libre)
L’éducateur est né entre 1941 et 1945, dans les centres d’accueils et d’orientation créés par le régime de Vichy, préoccupé par le sort des 90 000 enfants et adolescents temporairement perdus, orphelins et/ou en errance. Les « moniteurs » d’alors utilisent des méthodes inspirées du scoutisme et vivent dans la précarité. C’est une quarantaine d’entre eux qui créent, en 1947, l’ANEJI, sous le haut patronage de l’État. Cette proximité avec les sphères du pouvoir va perdurer longtemps. Cette association constituera un véritable creuset où se construira la nouvelle profession, lui donnant une cohésion, une cohérence et une unité qui transcendent les particularismes. Elle définit clairement la distinction entre le rôle des instituteurs, celui des surveillants et la fonction rééducative. Elle contribue à unifier les salaires, en les alignant sur les traitements de l’Éducation surveillée (aujourd’hui PJJ).
Même si ses membres sont pour la plupart imprégnés de catholicisme, l’ANEJI se définit comme apolitique et aconfessionnelle. Dès 1951, elle met au point un « fichier noir » qui répertorie les professionnels aux comportements indignes (pour des raisons de mœurs, de fautes éducatives ou de délits) et ceux ayant déjà échoué dans les pré-stages. L’ANEJI participera aux débats avec les écoles de formation professionnelle, affirmant préférer mesurer la culture et l’intelligence dans la vie de tous les jours, plus que dans les épreuves théoriques. La professionnalisation, la signature de conventions collectives, la fin du paternalisme unifiant salariés et direction autour d’un même idéal au service de l’enfance malheureuse signeront la fin de cette association qui, dirigée jusqu’au bout par des directeurs, s’étiolera et disparaîtra, après avoir refusé de se transformer en syndicat.
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