N° 1311 | Le 15 février 2022 | Critiques de livres (accès libre)
S’ajuster
L’impatience collective à nous sortir de cette pandémie risquerait bien de nous faire oublier les épreuves qu’elle nous a imposées. C’est pourquoi ce livre est essentiel : ce témoignage pour l’histoire constitue une balise de la mémoire auquel il sera toujours possible de se référer, à l’avenir. Didier Dubasque a procédé à une compilation méticuleuse qui, pour n’être certes pas exhaustive, n’en est pas moins des plus systématique. Reportages de presse, communiqués, tribunes, interviews, articles, alertes, appels, récits, plateformes en ligne… sont répertoriés chronologiquement, sous deux angles. Celui d’abord des effets sanitaires, psychologiques, sociaux subis par les publics les plus vulnérables : montée des situations de précarité alimentaire, alors que les distributions de colis de nourriture se réduisaient par manque de personnel et de bénévoles ; étudiants impactés plus que jamais, ceux du secteur social et médical se dévouant tout en protestant d’être utilisés comme main d’œuvre gratuite ; des SDF verbalisés pour n’avoir pas respecté le confinement chez eux, alors même qu’ils vivaient à la rue ! Sont répertoriées, en même temps, les réponses réactives, innovantes et inventives des travailleurs sociaux face à cette situation. Certes, les acteurs de l’aide et du soin ont été pris en étau entre se protéger eux et leur famille et le refus d’abandonner les personnes qu’ils accompagnaient. Mais, ils sont nombreux à être restés sur le pont. Par le maintien des accueils en internat, malgré la carence de protections non mises à leur disposition. Par l’usage du téléphone et des réseaux sociaux, pour compenser l’arrêt des visites à domicile. Par le choix de se confiner avec les usagers, même parfois. Aussi invisibles que les plus fragiles, les travailleurs sociaux méritent cet hommage qui leur est ainsi rendu.
Jacques Trémintin
Dans le même numéro
Critiques de livres