N° 646 | Le 12 décembre 2002 | Patrick Méheust | Critiques de livres (accès libre)
Comment entre-t-on dans le soin psychiatrique et comment réussit-on à en sortir (car on en sort ?) sont les thèmes abordés sous différents aspects par cet ouvrage. Mais, au delà, sont aussi abordés les rapports tumultueux qu’entretiennent les mondes « jumeaux » du sanitaire et du social. Selon M. Sassolas qui pilote la présente publication : « La véritable porte du soin psychique est celle qui ouvre sur la vie psychique du patient, ses fantasmes, ses désirs, ses angoisses, ses souvenirs, ses affects – celle qui le met en communication avec lui-même ».
Seulement voilà, la porte est parfois solidement verrouillée car nombre de difficultés peuvent être à l’origine des troubles ressentis par le patient en question. Aussi, chaque relation thérapeutique est unique puisqu’il s’agit pour le soignant de découvrir une histoire particulière et d’adapter une méthode au fur et à mesure que la relation se densifie mais aussi se complexifie. Cependant, il faut bien admettre que « rentrer » en soins psychiatriques n’est pas encore une démarche facile tant le psychiatre est encore perçu comme un « détecteur » d’anormalité. Quantité de peurs se manifestent ainsi en amont si bien que contracter une relation thérapeutique est parfois une démarche qui peut prendre beaucoup de temps.
À l’inverse, certaines situations de prise en charge peuvent s’éterniser. C’est souvent le cas lorsque le contexte médical reproduit un système familial douillet. Le docteur Guyotat remarque ainsi à propos du service hospitalier dont il a eu la responsabilité pendant plusieurs années : « Ceux qui en arrivant voulaient à tout prix sortir, devenaient assez souvent au bout de quelques semaines ceux qui voulaient à tout prix rester » ? Il n’est d’ailleurs pas certain que la pratique de secteur ait modifié beaucoup de choses à ce niveau, le phénomène d’attachement à l’institution pouvant se manifester aussi hors des murs de l’hôpital.
Mais, la problématique des portes d’entrée dans le soin interroge aussi sur ce qu’est, en réalité, le soin. Il est patent que dans le secteur socioéducatif le besoin de soin est invoqué dès lors que l’institution se sent menacée dans son équilibre voire, dans sa vocation même. C’est le cas, par exemple, lorsqu’un usager trouble à ce point le fonctionnement interne qu’il ne reste plus comme solution que de l’orienter vers la psychiatrie. On peut se demander alors si ce n’est pas l’institution elle-même qui, en l’occurrence, a besoin de panser ses plaies ?
Voilà effectivement une bonne question. Le lecteur en trouvera d’autres au fil des pages de ce recueil de contributions où domine le souci d’une réflexion intelligente.
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